La princesse Aurore d'Oksana Bondareva (c) Day Kol |
La semaine du Festival du Ballet du Bayerisches Staatsballett bat son plein à Munich. Les organisateurs avaient invité pour deux représentations le célèbre Ballet Mikhailovsky de Saint-Pétersbourg, dont les destinées artistiques sont depuis peu confiées au chorégraphe espagnol Nacho Duato, un chorégraphe très apprécié du public munichois qui a à plusieurs reprises eu l'occasion de découvrir ses chorégraphies alors qu'il dirigeait la Compañia Nacional de Danza, et notamment avec son célèbre Vielfältigkeit. Formen von Stille und Leere.
Nacho Duato a repris les destinées du Ballet Mikhailovsky depuis 2011 et a su s'y entourer de quelques-uns des solistes les plus demandés sur le plan international. Fin 2011, il y a présenté sa chorégraphie de la Belle au bois dormant de Tchaïkovski, et c'est cette version qu'a pu découvrir cette semaine le public du Bayerisches Staatsballett au Théâtre national de Munich.
Nacho Duato avait d'abord eu l'idée de reprendre la chorégraphie originale de Marius Petipa mais s'était finalement écarté de ce projet initial en créant ses propres pas de danse pour la compagnie dont il venait de reprendre la direction artistique. La nouvelle chorégraphie respecte la ligne traditionnelle de l'action et donne une réinterprétation qui utilise les moyens du ballet classique: pour cette production, Duato utilise le vocabulaire la danse classique et utilise les différents pas, les attitudes, les positions, les mouvements et les expressions codifiés de cette forme de danse. La nouvelle mise en scène, au raffinement exquis, ne désoriente pas plus un public entièrement charmé par les somptueux décors et les magnifiques costumes d' Angelina Atlagič, qui crée une ambiance de conte de fées avec de grands dons de coloriste, comme par exemple dans la scène de la chasse en forêt du Prince Désiré avec son atmosphère automnale ou pour la scène très printanière de l'adolescence de la Princesse Aurore avec une utilisation de roses et de verts tendres du meilleur effet. La stylisation de la forêt de ronces ou la pluie de roses orangées géantes qui vient peupler le ciel au-dessus du couple princier constituent des moments privilégiés de cette mise en scène. On pourra se faire une idée de l'excellence du travail d'Angelina Atlagič en allant visiter le site de la costumière qui offre pour l'instant un très beau reportage photographique de son art pour cette production.
Nacho Duato s'écarte quelque peu de la ligne de Marius Petipa en faisant danser des rôles qui étaient limités à la pantomime chez le chorégraphe de la fin du 19ème siècle. Ainsi le Roi et la Reine reçoivent -ils quelques figures de danse. Outre cela, Duato a le désir de gommer les courtes pauses entre les numéros des solistes, que l'on estimait autrefois nécessaires, et cette volonté d'une continuité dans la danse donne une impression beaucoup plus lissée, et ajoute de la fluidité et de l'harmonie au déroulement du ballet. Les temps d'applaudissements pour les numéros de solistes sont bien sûr toujours ménagés, mais la suppression des temps d'arrêts entre les numéros dansés est du meilleur effet, et le tempo narratif en sort gagnant.
Pour créer ses chorégraphies, Nacho Duato explique qu'il s'identifie à chaque rôle et qu'il se visualise en train de le danser. Cela lui donne une force visionnaire qu'il peut alors transmettre à ses danseurs. Et quels danseurs! Le rôle d'Aurora, la quintessence même du ballet classique, est interprété à la perfection par Oksana Bondareva. Le Prince Désiré de Leonid Sarafanov, un danseur couronné en 2006 du Prix Benois de la danse et, la même année, du Spirit of Dance est confondant de grâce aérienne. La Fée Lilas d'Ekaterina Borchenko et la Carabosse de Rishat Youlbarisov recueillent des applaudisements et des trépignements enthousiastes, tout comme la direction musicale de Valery Ovsianikov.
On ne peut que se féliciter de l'excellent choix de ce spectacle invité qui a permis au public du Bayerisches Staatsballet de vivre une grande soirée pétersbourgeoise.
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