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lundi 14 mars 2011

Viva la Mamma: Donizetti revisité au Theater-am-Gärtnerplatz

Viva la Mamma!

Le convenienze e le inconvenienze teatrali  - Le Theater-am-Gärtnerplatz reprend l'opéra que Donizetti a consacré en 1827 aux milieux du théâtre dans l'arrangement de la version en deux actes par Nina Kühner et   Sonja Westerbeck.


Stefan Sevenich, Extra-BallettSynopsis
Tempête dans le monde de l'opéra: les pires cauchemars deviennent réalité pendant les répétitions d'un opéra pour les chanteurs, le compositeur et l'impresario, à un point tel que la Première en semble compromise. L'action se déroule dans un théâtre de Lodi, où l'on est en train de répéter un nouvel opéra, Romolo ed Ersilia. Le compositeur  donne ses conseils à la prima donna. Les autres protagonistes, dont un ténor allemand, Guglielmo Antolstoinoloff, se plaignent d'être laissés au second plan et de l'attention exagérée que reçoit la cantatrice. Mamma Agata, la mère de Luigia, la seconda donna, exige qu'on développe la partie de sa fille en lui donnant un grand solo, et que le duo qui est pourtant prévu avec la prima donna soit chanté. En fait la prima donna ne veut pas le chanter car elle souhaite attirer toute l'attention sur elle.  Mamma Agata est prête à rosser la prima donna pour défendre sa fille...Un chanteur s'enfuit exaspéré,  Mamma Agata s'offre pour le remplacer mais le ténor, qui ne peut pas encadrer la Mamma et ne veut pas chanter avec elle, claque la porte à son tour...Il est remplacé par le mari de la prima donna, ...A ce chaos s'ajoute le problème des subventions de l'opéra, que la Ville menace de ne pas verser. Mais la générosité de la Mamma sauvera la production: elle mettra ses bijoux en gage pour que l'opéra puisse avoir lieu. Tout est bien qui finit bien: Viva la Mamma!
L'opéra caricature à gros traits (à peine diront les mauvaises langues) les problèmes que rencontrent nombre d'opéras: la farce de Donizetti met en scène tant les caprices des premiers rôles et leurs défections soudaines que les problèmes récurrents de financement des théâtres, ainsi que l'ingéniosité dont doivent faire preuve les directeurs de ces maisons. Le grotesque est encore accru par le fait que Donizetti  a conçu le personnage de la Mamma pour la voix de basse d'un homme travesti.

Les propos d'un spectateur
  
Pari réussi pour la metteure en scène Nina Kühner. Il fallait oser adapter l'oeuvre de Donizetti aux goûts du théâtre populaire munichois sans en perdre la substance et les saveurs, et Nina Kühner s'y est parfaitement employée.
On sait que l'oeuvre de Donizetti appartient à la grande tradition thématique du théâtre dans le théâtre: le théâtre aborde le sujet du théâtre et se met lui-même en scène. Donizetti crée un opéra sur la mise en scène supposée d'un opéra. Dans l'adaptation munichoise, Nina Kühner développe l'argument et crée des mises en abyme supplémentaires en introduisant des arias empruntés à d'autres opéras de Donizetti, ce qui crée des effets de surprise et de démultiplication, comme un emboîtement de poupées russes. C'est ainsi que la seconda donna se met à chanter Una furtiva lacrima au moment où le ténor s'apprête à lui faire une déclaration d'amour. A un autre moment, des danseurs interprètent une scène du music hall Cabaret.
Le choix du bilinguisme crée un effet de volume supplémentaire: les parties parlées ou les récitatifs sont en allemand alors que de nombreuses parties chantées sont en italien. Dans ce type de 'regietheater', pour apprécier pleinement les effets comiques des répliques, il vaut bien sûr comprendre la langue de Goethe. Comme souvent au théâtre de la Gärtrnerplatz, des allusions à l'actualité sont introduites dans le scénario, et, dans le cas présent, comme il s'agit de mise en scène et d'opéra, la problématique locale des subventions ou la rivalité supposée entre le Théâtre National et le Theater-am-Gärtnerplatz sont entre autres évoqués devant un public acquis et complice.
Nina Kühner a réalisé une mise en scène extrêmement précise et rigoureuse, réglée comme du papier à musique. Si, pour un court moment,  elle semble peiner à se mettre en route, on se rend vite compte du rythme que la metteure en scène veut imprimer au scénario, et dès que sa machine est mise en place, on est pris par le tempo soutenu voulu par la régie. Il faut souligner la qualité du jeu de la troupe: il s'agit constamment de caricaturer  les imperfections de la  mauvaise mise en scène de Romolo ed Ersilia, d'interpréter l'arrogance et de souligner les incompétences des chanteurs de cet opéra supposé. Organiser des mises en place laborieuses de décor, des ballets ratés, demander aux chanteurs de chanter avec des imperfections simulées, faire rire à propos du monde de l'opéra tout en présentant un spectacle réussi. Pari difficile, mais pari tenu!
Un des atouts majeurs du Theater-am-Gärtnerplatz est l'enthousiasme d'une troupe talentueuse: si toute la troupe prend un plaisir évident à incarner le travail de Nina Kühner sur l'oeuvre de Donizetti, la palme de l'interprétation revient sans conteste à Stefan Sevenich qui nous donne une extraordinaire Mamma avec un jeu d'acteur et des qualités de comédie qui rappellent l'extraordinaire Michel Serrault de la Cage aux folles.  Sevenich, qui a des rondeurs souriantes, incarne la féminité et les charmes perdus tout autant que la puissance  d'une femme mûre avec énormément de tendresse et d'humour. Il surprend par la souplesse des ses entrechats et de ses pliés ou de ses jetés, qu'il doit parfois réaliser sur la surface restreinte d'un podium, lorsqu'il représente la Mamma en train de s'exercer à la danse. Le public saluera sa performance d'une immense ovation.
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A noter, pour l'anecdote , mais aussi parce que c'est significatif de l'esprit de la Maison, que lors de la représentation du 13 mars, il a fallu remplacer au pied levé Heike Susanne Daum, clouée au lit par la maladie, qui devait chanter le rôle de la prima donna. Il ne s'agissait pas seulement de remplacer une chanteuse dans une mise en scène conventionnelle, il s'agissait de remplacer une comédienne dans une mise en scène complexe et minutieuse. La solution trouvée a donné un résultat magique: c'est la metteure en scène elle-même qui a revêtu le costume de la prima donna et en a joué le rôle alors qu'une chanteuse soliste de la troupe,  la soprano lyrique Elaine Ortiz Arandes (photo), en interprétait la voix en version concertante, avec un talent et un brio à peine imaginables! Cet aléa a créé une mise en abyme supplémentaire et la matriochka de Viva la Mamma a fait naître une nouvelle petite poupée. C'est là l'esprit du Theater-am-Gärtnerplatz, et c'est ce qui en fait l'un des lieux les plus appréciés du public munichois!


Prochaines représentations:

Les 19 et 31 mars 
Les 9 , 26 et 29 avril
et le 20 mai.

Pour réserver en ligne, cliquer ici, puis cliquer sur Karten bestellen à côté de la date désirée, et suivre la procédure..

Crédit photographique: Ida Zenna

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