Trois institutions appartenant au kaléidoscope de la vie culturelle munichoise, l'Opéra bavarois, le théâtre munichois pour la jeunesse et le Backstage, ont uni leur forces et leurs compétences pour stimuler l'intérêt des jeunes pour le théâtre et l'opéra par le truchement d'un spectacle total*. Le Backstage, un lieu alternatif avec espaces tant intérieurs qu'extérieurs qui accueille des soirées et des concerts de groupes de rock internationaux, a offert ses installations et sa technique ; quatre comédiens et comédiennes de la Schauburg, quatre chanteuses et chanteurs de l'Opera Studio, cinq instrumentistes et le compositeur de musique électronique Enik ont interprété un spectacle promenade sur des musiques de Monteverdi et d'Enik, — le nom d'artiste de Dominik Schäfer, des textes de chansons de Katja Leclerc et des dialogues composés par les jeunes acteurs et actrices et par le metteur en scène Daniel Pfluger. La première eu lieu ce 14 juin.
L'action se déroule lors d'une soirée en boîte, une soirée dans laquelle les spectateurs (surtout des jeunes de 15 à 20 ans) sont happés dès leur entrée dans la salle du Backstage. Quatre jeunes, deux filles et deux garçons, interprétés par des membres de la troupe de la Schauburg, participent à une soirée de clubbing, des néophytes en quête d'eux-mêmes et confrontés aux problèmes de l'être et du paraître, de la relation à l'autre et à soi-même et à leurs émotions. Une odyssée d'une nuit où ces jeunes vont expérimenter leurs limites, leurs extases comme leurs angoisses. Un voyage où le risque de se perdre fait partie du jeu. De la scène du club surgissent des êtres étranges, anges, démons ou extra-terrestres, habillés des costumes extravagants et flashy conçus par Florian Buder. Ils chantent des airs de Monteverdi accompagnés par un quartet et une cithariste : des strophes de l'Orfeo, ritournelle et prologue, des soli extraits du livre des madrigaux ou du Lamento della Ninfa. Quatre êtres fantastiques qui ne sont peut-être que des allégories de l'univers émotionnel et mental des protagonistes. La musique électronique et la culture des clubs viennent se mêler à l'univers musical particulier de l'opéra, à cette musique de Monteverdi qui plonge dans les profondeurs des états d'âme humains dont elle exprime les émotions de manière brute et directe. Les motifs de l'Odyssée se mêlent aux histoires contemporaines, la soirée invite à s'interroger sur ce qui se passe quand on se sent perdu et qu'on a perdu ses repères.
Au cours de cette première partie l'action se déroule sur une scène d'où sortent les interprètes pour venir jouer leurs parties sur un podium circulaire central, les spectateurs sont assis en tribunes latérales. Le public est ensuite invité à se déplacer vers un espace extérieur à la suite des protagonistes et à visionner des séquences musicales sur les téléphones portables. L'espace comporte quatre podiums où prennent place les quatre créatures magiques, chacune accompagnée d'un instrumentiste, et un podium central où opère Enik, le créateur et maître d'œuvre de la musique électronique. L'espace est participatif, des jeunes du public escaladent les podiums et se font photographier en compagnie des créatures. De courtes vidéos, réalisées par Sarah Scherer, sont diffusées sur des écrans.
En troisième partie, on retourne dans la première salle où sont projetées de nouvelles vidéos et où les acteurs et les chanteurs se mettent à danser sur la musique d'Enik dans une ambiance dynamisée par des lumières stroboscopiques, bientôt rejoints par le public invité à venir se déhancher avec les artistes. Les jeunes spectateurs sont visiblement ravis du spectacle participatif. En décloisonnant les frontières des genres, cette production commune a parfaitement atteint son objectif, celui de permettre aux jeunes de Munich de participer à la culture et de découvrir plusieurs facettes du théâtre musical.
* Ce qu'ils en disent
Serge Dorny, Andrea Gronemeyer et Hans-Georg Stocker |
Lors d'une conférence de presse organisée avant la première représentation, les directeurs des trois institutions ont souligné l'importance et la nécessité des coopérations entre les acteurs culturels de la société.
Serge Dorny, directeur général de l'Opéra d'État de Bavière : " Je suis convaincu que notre mission centrale est de participer de manière engagée à la création d'une société de demain. Nous avons besoin de lieux où des personnes d'origines et d'âges très différents peuvent se rassembler, former une communauté et entamer un dialogue. Il s'agit de saisir les opportunités afin de mettre en place de nouvelles coopérations et de créer de nouveaux espaces culturels — à l'Opéra comme dans d'autres lieux de la ville. Avec le projet commun Get Lost, — une expérience de théâtre musical très particulière, — nous souhaitons inciter un public aussi divers que possible à découvrir l'énergie contagieuse de la musique et du théâtre, qui se manifeste de multiples façons ". Il a également rappelé les synergies mises en place lors du récent festival d'opéra Ja, Mei !
Andrea Gronemeyer, directrice de la Schauburg : " Afin de développer le théâtre musical pour le jeune public, nous coopérons volontiers et très consciemment avec les partenaires culturels ici dans la ville. Nous avons une grande expertise du jeune public et des formats performatifs croisés. Nous les mettons à profit pour créer ensemble, avec l'expertise de l'Opéra national de Bavière en matière de théâtre musical et du Backstage en matière de culture club, une expérience artistique qui surprend le jeune public et va le chercher dans sa pratique culturelle orientée vers l'événementiel ".
Hans-Georg Stocker, fondateur et directeur de Backstage : " Le critère de la culture ne devrait pas être le genre, mais par exemple la valeur artistique et créative, l'innovation, la capacité technique ou 'artisanale', tout en tenant compte de la pertinence sociale et sociétale. Nous ne sommes pas les seuls, à Backstage, à penser que l'art et la culture ont une responsabilité particulière vis-à-vis de la société : celle de fournir des impulsions et des critiques, mais aussi de dépasser les limites et de provoquer parfois, tout en rassemblant la société de manière positive".
Le metteur en scène Daniel Pfluger aime mettre en scène des œuvres qui transcendent les genres et travaille dans différents médias. Get Lost est sa première collaboration avec Enik, un producteur de musique, chanteur et multi-instrumentiste bavarois basé à Munich, qui assure la direction musicale du spectacle et la production de musique électronique et possède une longue expérience en tant que musicien de théâtre.
Distribution
Dramaturgie Katja Leclerc et Daniel Pfluger
Musique Enik et Raphael Schluesselberg
Production Daniel Pfluger
Décors Katarina Ravlic
Costumes Florian Buder
Vidéo Sarah Scherer
Lumières Lukas Kaschube
16.6.23, 11h00 et 19h30
17.6.23, 19h30
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