Le Theater-am-Gärtnerplatz rencontre actuellement un immense succès avec sa nouvelle production de la comédie musicale rock Hair, qui va bientôt fêter son cinquantième anniversaire. Créée « off-Broadway » en octobre 1967 puis jouée à Broadway à partir d'avril 1968 pendant quatre ans sans interruption, la comédie musicale de James Rado et Gerome Ragni (pour les paroles) et de Galt MacDermot (pour la musique) avait connu à Munich une version allemande sous le titre Haare dès 1968.
Gil Mehmert en donne aujourd´hui une mise en scène d´une intelligence politique confondante dans la restitution de la réalité américaine des années soixante, et extrêmement poignante dans son actualisation: on en sort sans doute la tête pleine de chansons et de rêves, mais plus encore les larmes aux yeux et l´alarme au cerveau tant les parallèles avec notre vécu contemporain y apparaissent comme évidents.
Le public est accueilli par un mur aveuglant de 80 gros spots régulièrement étagés sur des échafaudages devant lesquels circulent nerveusement des hommes et des femmes affairés vêtus de manteaux ternes et portant des attaché-case. Deux hippies âgés, interprétés par Dagmar Hellberg et Frank Berg, semblent perdus dans cette foule sans âme. Dagmar Hellberg entonne la chanson d´introduction, The age of Aquarius, la scène se colore et s´anime du groupe des jeunes hippies, on est revenus aux années soixante. Jens Kilian a conçu des décors simples et efficaces: les deux échafaudages sur roulettes sont déplacés vers les deux cotés de la scène, au fond de laquelle se dresse un vaste podium où a pris place l´orchestre rock dirigé en alternance par Jeff Frohner et Andreas Partilla. Des éléments de décor sont introduits selon les nécessités de l´action, comme les meubles petit bourgeois de la maison provinciale des parents hyper conservateurs de Claude ou les plants de cannabis en pots de Woof (Lars Schmidt), le dealer de la bande, qui surgissent sous le podium. Ce sont surtout les très beaux costumes de Dagmar Morell ou les coiffures qui situent l´action dans le temps. Ici un cosmonaute lunaire et un concours de beauté avec des miss en maillots collants rappellent l´Amérique des années soixante, là l´Oncle Sam circule sur la scène sur des hautes échasses, là encore les parents de Claude poussent le patriotisme jusqu´à attacher leur propre fils sur une chaise électrique, métaphore cruelle de la folie patriotique qui prévaut sur l´amour parental. Des célébrités traversent cette époque passionnée, on voit Andy Warhol caméra au poing, Liz Taylor qui arrive en jeep militaire sur scène, Jimi Hendrickx ou encore un gourou indien, Gil Mehmert et sa chorégraphe Melissa King donnent vie à la masse mouvante et souvent agglutinée des hippies dans des tableaux changeants et chatoyants qui tiennent le public en haleine. Le génie créatif du metteur en scène est à l´oeuvre dans la relecture de certaines scènes, comme pour la chanson White boys interprétée par le trio des Supremes auquel vient se joindre Hud travesti en une grosse nounou noire, dans l excellente interprétation de Victor Hugo Barreto qui pousse sa voix vers des hauteurs délicieusement hilarantes. La chanson Black boys reçoit elle ausi une dimension nouvelle et sinistre, à contre-pied du texte, les chanteuses ayant revêtu les blanches tenues du sinistre Ku Klux Klan. s´appretent à réduire les blackboys en bouillie plutôt que d´en savourer les charmes.
Alors que la première partie déclinait l´élan d´une jeunesse amoureuse et fleurie et l´espoir d´un monde nouveau anarchique et collectif, la seconde développe la tension dramatique de la folie guerrière et du rendez-vous avec la mort. Gil Mehmert introduit des images de plus en plus fortes et poignantes et le rêve hippie se heurte à la mort de Claude, enrôlé contre son gré pour la guerre au Vietnam. La manifestation des hippies déroule une large banderole qui porte le slogan No one more dead. Vaine exigence. Claude est mort. Sa mort provoque cependant la métamorphose de ses si patriotes et conservateurs qui se transforment en hippies. La fin rejoint le début: les hippies âgés de la première scène, c´étaient les parents de Claude. Le dernier chant s´élève, alors qu´on a tous la gorge serrée et les larmes aux yeux: Let the Sunshine in. Mais le soleil parviendra-t-il à dissiper les ténèbres de la guerre et de la mort? Rien n´est moins sûr. En cinquante ans, Hair n´a pas pris une ride, mais c´est hélas le fait d´une actualité brûlante, les morts des guerres d´aujourd´hui n´ont rien à envier aux morts des guerres d´hier. Eros et Thanatos continuent leur danse macabre.
Alors que la première partie déclinait l´élan d´une jeunesse amoureuse et fleurie et l´espoir d´un monde nouveau anarchique et collectif, la seconde développe la tension dramatique de la folie guerrière et du rendez-vous avec la mort. Gil Mehmert introduit des images de plus en plus fortes et poignantes et le rêve hippie se heurte à la mort de Claude, enrôlé contre son gré pour la guerre au Vietnam. La manifestation des hippies déroule une large banderole qui porte le slogan No one more dead. Vaine exigence. Claude est mort. Sa mort provoque cependant la métamorphose de ses si patriotes et conservateurs qui se transforment en hippies. La fin rejoint le début: les hippies âgés de la première scène, c´étaient les parents de Claude. Le dernier chant s´élève, alors qu´on a tous la gorge serrée et les larmes aux yeux: Let the Sunshine in. Mais le soleil parviendra-t-il à dissiper les ténèbres de la guerre et de la mort? Rien n´est moins sûr. En cinquante ans, Hair n´a pas pris une ride, mais c´est hélas le fait d´une actualité brûlante, les morts des guerres d´aujourd´hui n´ont rien à envier aux morts des guerres d´hier. Eros et Thanatos continuent leur danse macabre.
Le Theater-am-Gärtnerplatz nous offre là un de ses spectacles les plus réussis avec des comédiens-chanteurs-danseurs hors pairs. Dominik Hees est vibrant d´énergie solaire en Berger, le chef de la troupe hippie. Bettina Mönch donne une Sheila émouvante et sensible. La Jeanie de Christina Patten est une des révélations de la soirée. La palme revient à David Jakobs qui incarne le personnage tiraillé de Claude Bukowski à qui il confère dimension et profondeur avec une présence en scène impressionnante et une chaude voix de rockeur.
Le public a couronné ce spectacle d´une standing ovation avant de se mêler à la danse et aux chants des comédiens. Une des plus belles réussites du Theater-am-Gärtnerplatz de Munich, saluée par une critique unanime, et dont on espère une prochaine reprise une saison prochaine car Hair se joue à guichets fermés jusqu´au 17 mars.
Crédit photographique: Christian Pogo Zach
Crédit photographique: Christian Pogo Zach
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire