Jésus au jardin des oliviers (Drew Sarich)
Jésus ne ressuscite pas vraiment sur la scène du Cirque Krone, bien mieux, il se réconcilie avec Judas, ce qui est la plus belle concrétisation de son message d'amour inconditionnel Le music-hall d'Andrew LLoyd Webber fait un tabac en ce moment à Munich. Le Theater-am-Gärtnerplatz a eu l'excellente idée de programmer un des meilleurs opéras rock des années 70 et ce faisant a réussi à drainer un public jeune qui jusqu'ici n'avait pour la plupart jamais franchi les portes du célèbre théâtre lyrique populaire de la capitale bavaroise. Le Superintendant du théâtre, Josef Köpplinger, ouvre ainsi de nouveaux horizons, et c'est fort bien ainsi. Un défi relevé avec succès, car le Cirque Krone fait salle comble pour les trois représentations prévues, ce qui laisse à penser que, lors d'une reprise, plus de représentations pourraient être programmées.
On nous avait annoncé une version concertante, mais en fait l'oeuvre d'Andrew LLoyd Webber a quasi été mise en scène par Josef Köpplinger. L'orchestre occupe la partie supérieure d'un huitième des gradins de l'amphithéâtre, au centre de la piste un petit podium à deux niveaux de chacun deux gradins permet aux protagonistes principaux de la passion de Jésus de venir y chanter en se saisissant d'un des quatre micros placés aux quatre angles du podium. Au sommet de la scène, comme pour un concert rock, une appellation qui peut presque convenir à l'oeuvre de Webber, il y a en effet suffisamment de parties solos pour cela.
Au début du spectacle les chanteurs et les choristes vêtus de longs manteaux sombres déboulent des allées qui desservent l'amphithéâtre, comme s'ils surgissaient du sein du public. Ils prendront le même chemin en sens inverse à la fin du spectacle. Ce type d'entrée en scène a un effet d'inclusion: le disciples de Jésus, cela peut-être vous qui êtes assis sur les gradins de cette salle, chacun est convié, et à la fin du spectcale, chacun peut repartir avec le viatique du message délivré. Le choeur viendra entourer le podium, Jésus sur une des marches parle à un petit groupe de disciples d'une manière proche et familière, tandis que Judas chante au micro. Tout au cours du spectacle, la tension entre les deux hommes sera palpable. C'est qu'ils ont des visées théologiques et politiques qui divergent, la suite biblique nous en est connue.
Les rôles principaux sont confiés à des chanteurs de premier plan. L'Américain Drew Sarich chante le rôle-titre sans grimage particulier. Köpplinger n'a pas voulu d'un Jésus barbu aux cheveux longs comme une certaine tradition aime à se le représenter. Drew Sarich est là tel qu'en lui-même, avec ses cheveux courts et sans barbe, et habillé de manière simple et décontractée, le bonnet sur la tête, en débardeur marcel, jeans et basketts, tatouage au bras. Sarich est bien connu en Allemagne et en Autriche dans le monde de la comédie musicale ( il fut entre autres Quasimodo à Berlin ou Berger dans Hair à Vienne) comme il l'est à Broadway ou à Londres. Il nous donne un Jésus de chanteur rock avec une présence intense et un charisme puissant, et de belles possibilités dans l'aigu notamment dans de longs cris expressifs chantés avec de longues tenues de notes. Le Judas d'Alex Melcher est tout aussi exceptionnel avec une intensité dramatique magnifique dans l'expression virulente des convictions, mais aussi des doutes et des déchirements qui traversent ce personnage complexe. Le Pilate d'Erwin Windegger participe lui aussi de cette même intensité scénique et de cette même réussite vocales. Peti van der Velde donne des accents soul à sa Marie-Madeleine: si elle est très convaincante dans le mezzo et par les raucités de sa voix, elle accroche moins dans l'aigu.
Marie-Madeleine (Peti van der Velde), Jésus (Drew Sarich) et Judas (Alex Melcher) |
Jeff Frohner fait rocker l'orchestre du Theater-am-Gärtnerplatz, en donnant parfois trop d'importance aux percussions. On comprend bien que le rock accorde une place privilégiée à la batterie, mais pas au point de couvrir certaines parties chorales importantes qui sont passées au second plan, les excellents choristes méritaient un meilleur traitement.
Le public captivé a adoré cette production. Standing ovation, cris enthousiastes et bravi. Le Theater-am-Gärtnerplatz termine en beauté une excellente saison.
Crédit photographique: Christian Zach
Crédit photographique: Christian Zach
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