Un dessin et un article satirique du Triboulet du 30 mai 1886. La presse française évoqua souvent les ennuis financiers du roi Louis II que le satiriste attribue ici à la passion du roi pour la musique de Wagner et à son coûteux mécénat pour " l'araignée Wagner", dont on voit la toile tissée et le petit portrait la surplombant.
UNE VICTIME DE WAGNER
J’avoue, pour ma part, que je n'ai jamais eu une grande sympathie pour la personne ni pour la musique de Richard Wagner. L’homme était un communard manqué qui, en 1849, avait essayé de fonder la République en Saxe. Ayant raté son coup, il fila prudemment et se vengea durement de ses mécomptes politiques en asservissant un roi et en prenant lui-même le sceptre dans le royaume des diéses et des bémols. Le chemin battu de la mélodie ne pouvait convenir à ce briseur d’idoles et d'idéal ; il se fit cacophonie, et réussit, grâce à son audace, sa persévérance et un peu aussi, pour être juste, à son talent qui perçait quand même, à prendre sinon la première, du moins la place la plus en vue parmi les paroissiens qui pincent de la lyre. Le roi Louis II de Bavière lui fut aussi d'un utile concours; on peut même dire que sans ce royal protecteur l’auteur des Niebelungen eût probablement végété comme pianiste dans une brasserie ou accordeur à domicile. Aujourd'hui, l’infortuné monarque expie cruellement son affection pour le beau-père d’Emile Ollivier. Son engouement pour le Rheingold n’a pas rempli d’or le fisc royal, et les créanciers aux becs de vautours sont rangés autour du ténébreux wagnérien, prêts à le déchirer et à semer aux quatre vents les os décharnés de cette illustre victime de la musique moderne. On attend un juif compatissant pour tirer Sa Majesté d’embarras ; mais les banquiers israélites boudent en ce moment. Jusqu’à ce qu’on ait brûlé Edouard Drumont et son admirable livre, la France juive, en place de Grève, ils ne prêteront plus d’argent aux chrétiens, sinon aux intérêts de 200 pour 100. Lâché par les usuriers sémites, que va devenir ce Job couronné ? Non seulement ces créanciers le déclarent pauvre d’argent, mais encore les sommités médicales le proclament pauvre d’esprit. Et dire que si, au lieu de s’enticher du gendre de 1'abbé Liszt, Louis II avait attiré Offenbach à Munich, il serait aujourd'hui un des plus joyeux drilles de l’Europe, au lieu d’être un malheureux mélomane dont la cervelle et la caisse ont été rongées par l’araignée Wagner !
Caillette
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