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mercredi 20 novembre 2019

Le Roi sans amour du Prince Paul Morousy (1946) dans la presse de l'époque


Le Roi sans amour est une pièce de théâtre écrite par le Prince Paul Morousy en 1943. Elle met en scène la vie de Louis II de Bavière. La pièce parut aux éditions Lanson.

Un Prince écrivain


Paul Morousy (Paris 1915- Vaucluse 2002) fut un Prince franco-russe qui écrivait sur les Empereurs et les Rois, un écrivain français, auteur de romans historiques se passant dans la Russie tsariste. 

Son père, le Prince Constantin Mourousy, fut un des derniers diplomates de la Russie tsariste à Paris. Il épousa la fille d'un général français. Son oncle, le Prince Alexandre Mourousy, fut aide de camp de l’empereur Nicolas II, qu'il accompagna lors de voyages officiels.

Historien, romancier, dramaturge, poète, journaliste et conférencier, le Prince Paul Mourousy a obtenu le prix d’Histoire de l’Académie française 1985 pour son Raspoutine, également couronné du prix Sévigné européen Louise Weiss. 


A la recherche de la pièce de théâtre perdue 

Un Roi sans amour de Paul Morousy a été mis en scène par Robert Favart au Théâtre des Bouffes du Nord en décembre 1946. La pièce avait été lue en public lors d'une causerie en janvier 1943. C'est ce que rapporte le journal Comoedia du 23 janvier 1943:

Comoedia 

Une pièce sur Louis II de Bavière

Les historiens ont beaucoup écrit, comme les amoureux de la musique, sur Louis Il de Bavière. On se sonvient, entre autres, des livres de Jacques Bainville et de Guy de Pourtalès. Mais les auteurs dramatiques?

Cet oubli de notre théâtre va être réparé. Au cours d'une causerie consacrée, le 25 janvier, chez Carrère, à "L'aigle et la colombe. Elisabeth d'Autriche et Louis Il de Bavière", par les Cahiers d'art et d'amitié, une scène d'une pièce écrite par M. Paul Mourousy sera, pour la première fois, jouée.
Œuvre qui a pour thème essentiel les amours idéales du roi Cygne et de celle qui deviendrait, par la suite, l'épouse de l'empereur François-Joseph.

Belle occasion de jouer quelque fragment de la musique de celui qui dut tant à Louis II de Bavière: Richard Wagner. [...]

Les lettres françaises


Le journal Les lettres françaises du 22 novembre 1946 commente le changement de titre de la  pièce de Paul Morousy :

La pièce de M. Paul Mourousy, que répètent actuellement Alice Field, Robert Favart, Henri Beaulieu et Jeanne Lion, aux Bouffes-du-Nord. devrait s'appeler « Le Roi vierge ». Mais les héritiers de Catulle Mendès qui fit un roman du même titre veillaient...

Et notre jeune auteur a intitulé son oeuvre : « Le Roi sans amour ».

Le journal Les lettres françaises du 29 novembre 1946 fait encore le commentaire suivant :

C'est là [au Théâtre des Bouffes du Nord], en tout cas, que va être présentée la pièce qu'un jeune auteur, Paul Mourousy, termina en 1944 : Le Roi sans amour, inspiré de l'histoire de Louis II de Bavière, surnommé le roi vierge. Le rôle plut à Robert Favart qui décida de monter la pièce à condition qu'elle fût considérablement réduite. En effet, Le Roi sans amour comprenait 25 personnages et était aussi long que Le Soulier de satin. Il a maintenant une pointure plus normale.

Les lettres françaises du 13 décembre donne de la pièce un compte-rendu succinct :

Retouches

Paul Mourousy vient de découper, aux Bouffes du Nord la vie romantique, sinon romanesque du Roi sans amour, Louis II de Bavière. Sans amour ? Celui qui n'osa pas dire son nom, le tourmenta pourtant jusqu'à l'heure suprême ; cet amant de la pureté ; ce monarque de conte de fées, s'abandonnant entre les brass de ses laquais. Sa première passion d'adolescent fut Richard Wagner : amour de tête.

« Quand l'ami fidèlement aimé sera mort, avait écrit Louis II, alors ce sera fini pour moi aussi. » Il lui survécut pourtant près de trois ans. M. Paul Mourousy, dans un pieux sentiment sans doute, a légèrement retouché la réalité. Le roi vierge ne survit pas à l'annonce de la mort du maître. Ce n'est point la seule entorse à la petite histoire dont l'auteur ait pris la responsabilité. Mais comme en l'espèce, la légende a toujours étouffé la vérité, il serait vain de chicaner Le Roi sans amour pour si peu de chose.

L'Aurore 

G. Joly rendait compte dans son édition du 10 décembre 1946 du journal L'Aurore de la pièce Le Roi sans amour que montait alors Paul Morousy aux Bouffes du Nord à Paris.

Coupure de presse de L'Aurore

Le Roi sans amour
(aux Bouffes du Nord)

Du roi vierge au grand cœur pour l'homme seul battant, M PAUL MOUROUSY n'a voulu nous offrir que la légende : celle du Lohengrin couronné poursuivant, sur ses lacs limpides, son rêve wagnérien ; du jeune homme subtil aux yeux d'émail, pur comme un lis, amoureux de la seule beauté. Il a pieusement escamoté ce que l'Histoire impitoyable a rassemblé en un faisceau accablant : démence inguérissable, manie de la persécution, césarisme, cruauté, narcissisme, homosexualité et cet avortement de l'artiste, du bâtisseur maniaque dont les châteaux d'opéra demeurent pour porter le témoignage d'un mauvais goût exaspéré jusqu'à la caricature. Louis II de Bavière, rejeton dégénéré d'une race maudite, s'est efforcé de suivre le conseil de sa cousine germaine, l'impératrice Elisabeth : « Ne pense pas à ce que le monde peut dire et écrire : qui peut nous toucher ? Nous pouvons tout nous permettre », lui offrant une fraternité d'âme dans l'éther, tandis que leurs corps, chacun de leur côté, prenaient à la terre tout ce que celle-ci pouvait leur donner. Il n'est que de feuilleter le monstrueux Tagebuch aufzeichnungen du roi cygne, publié il y a vingt ans, où les égarements du pur esprit entre les bras de ses palefreniers et de ses chevau-légers sont restés, avec des cris de repentir et de désespoir, jusqu'à la veille même de la tragédie.

Les neuf tableaux, de l'hagiographie de M. Paul Mourousy prétendent à la vérité historique : certes, ils ne nous masquent point la déchéance de l'adolescent aux traits fins, au front bombé sous l'encadrement de cheveux bruns et bouclés dont le regard brillait d'une suave splendeur devenu un géant hirsute, aux dents pourries, boutonnant dans un vieux paletot ses cent vingt kilos de podagre. Mais ils ramassent au dénouement, en une seule scène, des événements que des jours, voire des années, séparent. Servitude du théâtre sans doute et que le spectateur acceptera sans murmurer, car le drame de Neuschwanstein, achevé dans la vase du lac de Starnberg, n'est point de ceux dont il peut avoir un venir très précis.

M. Robert Favart (Louis II) et Mme Alice Field (l'impératrice Elisabeth) sont les protagonistes de cette Imagerie wagnérienne sur laquelle Lohengrin, Tannhäuser, la Walkyrie et Tristan et Isolde font planer leurs prestiges, G. JOLY.

Combat

Jacques Lemarchand  donnait sa chronique de la pièce dans le journal Combat du 11 décembre 1946.

"Le Roi sans Amour" aux Bouffes-du-Nord

D. —A quel genre dramatique appartient « Le Roi sans amour », de Paul Mourousy, qui se joue actuellement aux Bouffes-du-Nord ?
R. — « Le Roi sans amour, de Paul Mourousy, qui se joue actuellement aux Bouffes-du-Nord, est une pièce historique.
D. — Qu'est-ce qu'une pièce historique ?
R. — On appelle communément pièce historique une pièce qui met en scène un personnage connu de l'histoire, et retrace sa vie, ou un épisode se sa vie.
D. — Titus est-il un personnage connu de l'histoire ?
R. — Oui, Titus est un personnage connu de l'histoire,
D. — Direz-vous donc que la « Bérénice », de Jean Racine, est une pièce historique ?
R. — Non, je ne dirai pas que « Bérénice » est une pièce historique, et vous m'amenez ainsi à modifier la définition que j'ai donnée de ce genre dramatique. Je dirai donc qu'une pièce historique est une pièce' qui met maladroitement en scène un personnage historique retrace, sans profit pour personne, sa vie, ou un épisode de sa vie.
D. —Continuez-vous à soutenir, en ce cas, que « Le Roi sans amour », de Paul Mourousy que l'on joue actuellement aux Bouffes-du-Nord, est une pièce historique ?
R. — J'y persévère. J'ajouterai qu'ainsi définies les pièces historiques se divisent en deux catégories. A savoir : celles qui ennuient, et celles qui donnent le fou rire.
D. - Dane laquelle de ces catégories rangez-vous « Le Roi sans amour », de Paul Mourousy, que l'on joue actuellement aux Bouffes-du-Nord,
R.— Dans la première de ces catégories, « Charlotte et Maximilien », de Maurice Rostand, restant le type privilégié de la seconde.
D. — Par quels moyens la pièce de Paul Mourousy provoque-t-elle l'ennui ?
R. — Par les moyens les plus habituels ; à savoir : un dialogue parfaitement banal, une action qui piétine, peu de vérité dans la peinture des sentiments. Les éclats de style semblent faux. Les tableaux sont interminables pour t'attention la plus indulgente. Les décors étonnent mais ne distraient qu'un instant, car l'homme s'accoutume aussi à la laideur.
D — Les acteurs qui interprètent la pièce de Paul Mourousy ne sont-ils en rien responsables de l'impression d'ennui que vous signalez ?
R. — En fait, certains d'entre eux n'y sont pas tout à fait étrangers. Je ne nommerai pas ceux-là parce que je ne puis décidément faire grief à des acteurs de ne pas rendre intéressante une pièce qui ne l'est pas. Et si je nomme Brigitte Bargès, ce sera seulement pour dire qu'elle a un joli visage ; et Robert Favart (Louis Il de Bavière), ce sera pour signaler qu'il a des attitudes, parfois, nobles.
J'ajouterai que j'ai été content d'entendre Wagner jouer du piano, et Cosima chanter, parce que ce sont des plaisirs rares. Et très content aussi de n'avoir pas vu Wagner sur la scène, ce qui chez moi au moins, eût déclenché le fou rire.
D. — Encouragez-vous le public à aller assister aux représentations de la pièce de Paul Mourousy ?
R. — Je ne répondrai à cette question qu'en présence d'un avocat.

Jacques LEMARCHAND.

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