L’observateur d’un phénomène est rarement neutre, il l’approche
chaussé des lunettes de sa propre Weltanschauung (1),
ce qui le conduit souvent à trouver ce qu’il cherchait dans l’objet observé (2).
Le regard contribue à façonner la réalité qu’il contemple. Ce fut aussi le cas
de celui que portèrent les chroniqueurs français catholiques contemporains du
règne de Louis II de Bavière, qui ont examiné le règne et la folie supposée du
roi au regard du catholicisme français ultramontain et légitimiste. Une partie
des textes dans lesquels ils ont transmis leurs impressions sont rassemblés
dans ce recueil. Ces chroniqueurs rencontraient dans l’hexagone des problèmes
similaires à ceux que connaissaient les catholiques bavarois, confrontés au
Kulturkampf prussien, divisés sur la question le dogme de l’infaillibilité pontificale,
majoritaires dans les chambres mais empêchés de gouverner. Leurs textes, encore
marqués par l’humiliation de la défaite de la guerre franco-prussienne, reflètent
leur vision politique. Ils rendent par ailleurs compte de la perception
française des circonstances non encore élucidées de la mort de Louis II.
La presse française avait suivi avec un intérêt grandissant
la fin du règne du roi Louis II de Bavière qui trouva sa conclusion dans le
drame de Berg. Les circonstances de la mort tragique du roi, dont le cadavre
avait été retrouvé flottant près de la berge du lac de Starnberg, non loin de
celui de son médecin, le Dr von Gudden, n’avaient pas manqué d’entraîner une
foule de commentaires et d’hypothèses sur les causes de la mort du roi et de
son psychiatre. S’agissait-il d’un suicide, d’une tentative de fuite ayant
entraîné une rixe, ou encore d’un meurtre bien vite déguisé, et, dans ce
dernier cas, qui l’avait perpétré et qui l’avait commandité ? Ces
questions n’ont jusqu’à aujourd’hui jamais trouvé de réponse définitive. Les journalistes
et les chroniqueurs de l’époque ne manquèrent pas de les évoquer en émettant
toute une série d’hypothèses, des plus plausibles au plus farfelues.
[1] Terme
philosophique allemand communément traduit par « conception du monde ».
[2] Nous ne pouvons pas effectuer d'observation
sans perturber le phénomène à observer (Werner Heisenberg).
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