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mercredi 11 avril 2018

Question d'histoire: Nouvelles révélations sur l'affaire Vanderpoole / Le roi Louis II a-t-il lu Edgar Allan Poe?

L'affaire Vanderpoole 

La question de savoir si Louis II était ou non  un lecteur de Poe ne se posait pas jusqu'il y a peu, car nombre de livres consacrés au souverain relataient en la donnant pour certaine  l'histoire d'une audience que le roi aurait accordée, le 27 février 1882 (1) à Lew Vanderpoole, un journaliste et écrivain américain qui en avait fait le récit. Lors de cette audience, le roi aurait confessé à Vanderpoole sa passion pour l'écrivain américain.

Le problème est que cette audience n'a jamais eu lieu, sinon dans l'imagination fertile de Vanderpoole, qui en avait opportunément fait un papier peu de temps après la mort du roi. Nous avons l'an dernier consacré une étude à cette question que nous avons publiée en octobre dernier sous le titre L'affaire Lew Vanderpoole : le compte-rendu de l'audience accordée par le Roi Louis II à l'écrivain américain est-il un faux littéraire? (ou dans sa traduction allemande Der Fall „Lew Vanderpoole“: Ist der Bericht der königlichen Audienz vom amerikanischen Schriftsteller ein literarischer Betrug?).  Pour comprendre la suite, il serait utile d'avoir pris connaissance de l'article mentionné.

Aux archives munichoises, Vanderpoole est aux abonnés absents

Depuis notre publication, nous avons poursuivi notre enquête en nous rendant aux archives de la ville de Munich (Stadtarchiv München) pour essayer d'y trouver mention du passage de l'Américain dans la capitale bavaroise. Dans la seconde moitié du 19ème siècle, les étrangers de passage ou séjournant à Munich se faiaient enregistrer à la police, qui répertoriait les arrivants soit dans un registre pour les séjours de courte durée soit dans un registre pour les séjours plus longs ou à durée indéterminée (Polizeiliche Meldebogen). Nous avons pu y consulter les deux types de fichiers, en prenant soin de parcourir les listes tant à la lettre V qu'à la lettre F, la police enregistrant les noms étrangers de manière phonétique, les noms étrangers en V étant le plus souvent classés sous F. Mais aucun Vanderpoole n'a été enregistré dans ces registres heureusement conservés pour la période qui nous occupe. Les érudits ludwighiens se souviendront qu'au début de son règne, le roi Louis II, soucieux de la présence éventuelle de Richard Wagner à Munich,  se faisait apporter ces registres pour y trouver la trace du passage du compositeur.

Comment l'article de Vanderpoole a-t-il été connu en Allemagne?

En 1886, la mort du roi Louis II avait abondamment été commentée tant dans la presse allemande que dans la presse internationale. Nombreux aussi ont été les médecins, et tout particulièrement les aliénistes, à se pencher sur la question de la folie du roi, que certains, et non des moindres, mettaient en doute notamment parce que la procédure suivie par la Commission bavaroise des médecins qui avaient établi ladite folie était, c'est le moins qu'on puisse en dire, entachée d'irrégularités, dont la pire était que ces médecins n'avaient pas procédé à un examen médical du roi et avaient rendu leur diagnostic sur base d'un ensemble de témoignages.

Une des études médicales parmi les plus intéressantes est celle que publia le Dr William Wotherspoon Ireland, un médecin aliéniste écossais, qui y consacra un premier article en octobre 1886 dans le Journal of mental science. Cet article fut rapidement traduit en français par le Dr. Victor Parant, qui le publia dans le Annales Médico-Psychologiques, tome v., dès janvier 1887. On en trouve, également en 1887, une traduction en allemand. (Lire à ce sujet notre article: La folie du roi Louis II de Bavière, par le Dr William Wotherspoon Ireland, traduit de l'anglais). 

Dès 1885, le Dr Ireland avait publié à Edinbourgh The Blot upon the Brain, Studies in History and Psychology (Edinbourgh, 1885; 2ème édit. 1893; New York, 1886), un ouvrage dans lequel il s'intéressait à l'état mental de personnages célèbres. Ainsi il y aborde les hallucinations de Luther, de Mohammed, de Swedenborg et de Jeanne d'Arc, il s'y intéresse à la névrose héréditaire de la famille royale d'Espagne, à Ivan le terrible et aux Romanov et la folie de diverses personnalités régnantes de l'histoire. En 1889, Ireland publia, également à Edinbourgh, un ouvrage parent  Through the Ivory Gate, Studies in Psychology and History, dans lequel figure un chapitre consacré au roi Louis II basé  sur l'article d'octobre 1886. Ces deux ouvrages sont consultables en ligne sur archive.org.

The Blot upon the Brain, Studies in History and Psychology (1885) avait sans doute attiré l'attention de l'éditeur allemand Robert Lutz, dont la maison d'édition était basée à Stuttgart. Lutz publia un ouvrage parent de W.W. Ireland dès 1887 sous le titre Herrschermacht und Geisteskrankheit: Psycho-pathologische Studien aus der Geschichte alter und neuer Dynastien (Stuttgart, Robert Lutz, 1887, 139 p.). Cet ouvrage, issu de The Blot upon the Brain, mais nettement plus court, en reprend certains des chapitres déjà publié , auxquels vient s'ajouter une  étude  consacrée à l'étude du cas de Louis II de Bavière (pp. 107 et suivantes).

Dans sa carrière d'éditeur, Lutz s'est notamment intéressé aux romanciers américains contemporains (comme Stockton ou Mark Twain)  et s'était donné pour mission de les porter à la connaissance des lecteurs germanophones. Cet intérêt l'avait sans doute mené à devenir le lecteur d'un grand magazine littéraire comme le Lippincott's Magazine. Et c'est ici que confluent les éléments de notre enquête. En annexe à la traduction de l'ouvrage d'Ireland, Robert Lutz eut l'idée de faire figurer la traduction en allemand de l'article de Lew Vanderpoole publié fin 1886 par le Lippincott's magazine. (1) Voici comment l'éditeur wurtembergeois introduit cet ajout: 

Herrschermacht und Geisteskrankheit, Op.cit., p. 134.

"Der nun als Anhang noch folgende Aufsatz erschien vor Kurzem in Philadelphia in der Zeitschrift Lippincott’s Magazine. Da dessen Inhalt durchaus den Stempel innerer Wahrscheinlichkeit an sich trägt, auch keinerlei anderweiter Grund für die Annahme einer Mystification vorliegt, so glaubten wir
den Lesern diesen psychologisch interessanten und unseres Wissens in Deutschland noch nirgends veröffentlichen Beitrag zum Lebensbilde des unglücklichen Monarchen nicht vorenthalten zu sollen."

Ce qui donne en français: " L'appendice en annexe a été publié à Philadelphie dans la revue Lippincott's Magazine. Puisque son contenu porte le sceau de la vraisemblance et qu'aucune autre raison n'existe pour justifier l'hypothèse d'une mystification.  nous avons cru bon de porter  à nos lecteurs cet article psychologiquement intéressant et à notre connaissance pas encore publié en Allemagne, estimant que cette contribution  à la biographie du malheureux monarque ne devrait pas être retenue. " (Traduction libre du texte allemand de l'éditeur).

Il est amusant de constater qu'en insistant sur la vraisemblance du récit de Vanderpoole er sur le fait qu'à ses yeux il ne peut s'agir d'une mystification, l'éditeur semble en fait nous faire part des doutes qui ont dû traverser son esprit  quant à l'authenticité de l'audience royale, ce qui donne à croire  qu'il ne disposait d'aucun élément attestant de la visite prétendument rendue par Vanderpoole au roi. L'éditeur ne savait sans doute pas que Vanderpoole venait de se faire confronter comme imposteur littéraire aux Etats-Unis.  

Comment l'article de Vanderpoole s'est-il ensuite répandu dans les ouvrages consacrés au roi Louis II?

Une fois l'article traduit en allemand en 1887 par l'éditeur Lutz, qui, on l'a lu, revendique la primeur de la traduction (aujourd'hui on parlerait d'un scoop), le ver est dans le fruit et ne demande qu'à entamer sa croissance.

Mais il lui a fallu le temps, peut-être parce que  livre d'Ireland que l'article de Vanderpoole ne propose l'article de Vanderpoole qu'en annexe. Des contemporains de Louis II, qui ont eu l'occasion de le côtoyer ou de l'approcher de près comme Karl von Heigel, Friedrich Lampert, Luise von Kobell ou Gottfried von Böhm, ne mentionnent pas l'article de Vanderpoole, et, à fortiori, la présence de l'imposteur à l'audience royale.

Trente-deux ans après l'éditeur Lutz, nous trouvons une retranscription partielle de l'article de Vanderpoole dans le premier numéro du journal Baierische Zeit-Dokumente (2), dont quelques numéros parurent à partir de 1919. Ce journal était entièrement rédigé par Georg Ludwig Schauenberg (aussi dénommé Scharrer-Schauenberg). Schauenberg a publié au moins deux petits livres consacrés au Roi Louis II. Le second, intitulé Im Banne der Rosen: König Ludwig II. in Tagebuchbl.(publié en 1924 à Diessen) cite à nouveau l'audience supposée de Vanderpoole et en précise la date, elle aurait eu lieu en 1882.

Deux ans plus tard, en 1926, un certain Ludwig Below (dont nous ne connaissons pas d'autre ouvrage) publie en feuilleton un roman historique consacré à Louis II sous le titre Dem Toten die Ehre / Entsiegelte Dokumente / Treue Bayernherzen ihrem Liebling als Denkmal. / Roman eines Königstraumes nach ganz neuerschlossenen Quellen. / 26 Liefrgn., München, Bayerischer Volks-Verlag, dans lequel il reprend l'article de Vanderpoole.

Nous n'avons pu établir la filiation entre l'édition de Stuttgart de 1887 et les Baierische-Zeit Dokumente et ne savons pas si l'emprunt est direct ou indirect. Si l'éditeur Lutz cite très professionnellement son emprunt au Lippincott's magazine, ni Schauenberg ni Below ne se préoccupent de citer leurs sources. Toute découverte intermédiaire serait la très bienvenue! Il y a peut-être là d'intéressants chaînons manquants

Depuis lors, l'affaire semble établie et la prétendue audience royale accordée à Vanderpoole est citée comme un fait établi par les historiens tant en Allemagne qu'à l'étranger. Ainsi la retrouvons-nous récemment mentionnée en français par Denise Gury dans son ouvrage Louis II de Bavière ou La vie rêvée: biographie intimiste (Vesoul, 2001). En allemand, Alfons Schweiggert  la retranscrit au début de son ouvrage Edgar Allan Poe und König Ludwig II. - Anatomie einer Geistesfreundschaft (EOS Verlag, 2010). Dans tous les cas, l'absence de la citation des sources est récurrente, ou, pire, de fausses sources sont citées. 

Louis II a-t-il lu Edgar Allan Poe?

C'est ce que nous avons imaginé dans un premier temps, mais c'est un point sur lequel nous souhaitons revenir. En fait, nous n'en avions l'indication que par Schauenberg et Below, qui tous deux citent entre guillemets (en principe le signe d'une citation précise et correcte) une phrase qu'ils attribuent à Karl von Heigel, un écrivain qui avait directement travaillé pour le roi et jusque dans les dernières années de sa vie comme traducteur et librettiste de pièces de théâtre:

" Auf seinen Schlösser", erzählt Karl Heigel, " hatte er keine andere Gesellschaft als Bücher; er las, las, las. Er hatte die Werke Ranke’s ebenso gründlich studiert, wie die 17 Bände des Duc de Luynes. Er kannte den ganzen Goethe und Favards (3) sämtliche Opern, Shakespeare und  Poe."

"Et Karl Heigel de raconter: " Dans ses châteaux il n'avait d'autre compagnie que ses livres: il lisait, lisait, lisait. Il avait tout aussi bien étudié en profondeur les oeuvres de Ranke que les 17 tomes du Duc de Luynes. Il connaissait tout Goethe et toute une série d'opéras de Favard (3) , Shakespeare et Poe".

La citation est donnée d'autorité par Schauenberg et Below, tout en différant légèrement d'un ouvrage à l'autre, ce qui nous n'avions pas relevé dans un premier temps. Cela aurait dû éveiller notre attention et nous inciter à aller consulter Karl von Heigel, pour essayer d'y retrouver ladite citation, ce qui est à présent chose faite.

Karl von Heigel n'a, à notre connaissance actuelle, écrit qu'un seul ouvrage consacré au roi Louis II, intitulé König Ludwig II. von Bayern, ein Beitrag zu seiner Lebensgeschichte (Stuttgart, 1893, 387 p.)
Si Heigel y évoque longuement les lectures et la passion de Louis II pour l'opéra et le théâtre, on n'y trouve pas la prétendue citation. Il faut par ailleurs nuancer les citations de Goethe et de Shakespeare, - nous y reviendrons - , et surtout constater que le nom de Poe n'est jamais mentionné. Or c'est sur cette citation de Heigel que repose l'affirmation de la lecture de Poe par le roi. 

Pour appuyer nos dires, on peut citer des extraits du texte de Heigel, en pages 68 et 69:




    " Von lebenden Fremdsprachen lernte der Kronprinz nur die französische. Daraus erklärt sich die Gleichgültigkeit König Ludwigs II für die englischen Geisteswerke. Allerdings hat uns die Schlegel'sche Übertragung Shakpeare wie einen der Unseren nahe gebracht; doch als der König Shakspeares Bekanntsschaft machte, war er bereits vom Zauber des Französischen, der Klarheit. dem Fluß dieser Sprache bestrickt. Da er Byron nur in mittelmäßigen Übersetzungen gelesen hatte, mochte er denn auch behaupten daß die leidenschaftliche Beredsamkeit Viktor Hugos bei keinen germanischen Dichter zu finden sei. Doch abgesehen von der schönen Literatur, abgesehen davon, daß mindestens 120 Millionen englisch sprechen, würde die Kenntnis des Englischen einem Prinzen von lebhafter Einbildung und kühnen Erwartungen besonders nützlich gewesen sein. weil sehr viele englische Bücher nicht oder ungenießbar übersetzt sind, die wichtige Beiträge zur Weltkenntnis zur Staatskunst bilden und ebensowohl ohne Grübelei, wie ohne Überschwang geschrieben sind.
   König Ludwig I.  sprach vier oder fünf lebende Sprachen und schwärmte namentlich für das Italienische, es berührt eigentümlich, daß der Enkel "die Vorlage von Dantes Göttlicher Komödie, aber nur in Übersetzung"  befiehlt [...]. " (Heigel, Op. cit., pp. 68 et 69)

On peut le lire et affirmer, ne fût-ce qu'au style, que la citation de Schauenberg et Below ne peut être correcte, et doit être  considérée comme la production d'un faux, ou tout au moins, d'une élucubration bien légère de feuilletoniste. Selon Heigel, la seule langue étrangère que Louis II ait connue est le français. Le roi ne savait pas l'anglais ou si peu qu'il ne pouvait lire les auteurs anglais qu'en traduction allemande. Heigel déplore que le souverain n'ait pas eu accès aux très nombreux livres en anglais fort bien rédigés sur les questions de politique. Il souligne que, contrairement à son petit-fils, le grand père de Louis II, le roi Louis Ier de Bavière, maîtrisait quatre ou cinq langues étrangères, avec une préférence marquée pour l'italien.

Heigel, Op. cit., extrait de la page 232

Plus loin, Heigel évoquera la seule formule en espagnol connue par Louis II, "Yo el Rey", en en soulignant l'origine historique, que le roi connaissait. Heigel remarque également que dans les représentations privées, Louis II ne se fit jamais représenter que le Périklès, prince de Tyr de Shakespeare, et encore parce que Ernest von Possart était déjà en train de la monter. Ce choix ne fut donc pas une initiative du roi.

"Le roi, nous dit Heigel, était souvent seul et avait le désir de continuer à se former et , dans ce but, lisait de nombreux livres. Il lisait de nombreux ouvrages, sans grand discernement, mais de manière approfondie, de préférence des ouvrages historiques, avec une préférence pour les mémoires et les correspondances. Les bibliothécaires royaux, les professeurs d'université et d'autres experts lui procuraient les informations qu'il souhaitait recevoir" (p. 232).

Ainsi le roi demande-t-il à recevoir la liste complète des oeuvres de Ferdinand Gregorovius (en juillet 1881) (4) , de Karl Gutzkow (en février 1886) (5), de Karl Frenzel (en septembre 1880) (6) ou de Sainte-Beuve. (p. 233). Il s'intéressait aussi à la personnalité et à la biographie de ces écrivains, notamment à celle d'August Becker (1828-1891) (7) dont certains romans avaient créé la polémique car ils s'intéressaient à la personne de Lola Montez et aux événements de 1848 en Bavière ou s'attaquaient à des personnalités de la cour bavaroise (ainsi de Vervehmt). (Heigel, Op.cit., p.233)

Le roi s'intéressait particulièrement aux écrits de Leopold von Ranke, un historien de premier ordre qui a influencé de manière fondamentale la science historique allemande et française. Fondateur de la méthode moderne de l'enseignement universitaire, il eut une influence très forte sur l'historiographie occidentale. « L'histoire ne sera faite que des témoignages directs et des sources les plus authentiques. » , écrivait Ranke, une leçon qu'il serait judicieux d'appliquer.

Ensuite, Heigel insistant sur le fait que Louis II ne lisait que l'allemand et le français revient sur sa passion pour le siècle de Louis XIV, il lisait tout ce qu'on pouvait lui procurer sur le sujet, d'autant qu'il avait tendance à s'identifier au Roi Soleil. Ainsi Louis II lut-il l'ensemble des Mémoires de Saint-Simon et celles du duc de Luynes.

Heigel évoque aussi longuement les traductions et les livrets de théâtre que le roi lui commanda pour ses représentations privées, et il s'agit soit d'oeuvres qui mettent en scène les 17ème et 18ème siècles français, soit d'oeuvres qui touchent à l'histoire bavaroise et aux mythes germaniques. De littérature anglo-américaine, il n'est jamais question, et l'oeuvre d'Edgar Allan Poe reste aux abonnés absents.

Conclusions

Nos recherches récentes confirment la thèse du faux littéraire créé par Vanderpoole, malencontreusement introduit en Allemagne par la traduction d'un éditeur stuttgartois sérieux mais insuffisamment informé. Des auteurs comme Schauenberg et Below sont tombés sur ce texte publié en annexe de la traduction de l'étude du Dr Ireland et ont contribué à la diffuser, commettant à leur tour une imposture littéraire de moindre ampleur: la citation entre guillements d'une phrase faussement attribuée à Karl von Heigel dans laquelle ils introduisent, opportunément pour le service de leur propre publication, le nom de famille d'Edgar Allan Poe.

Dans l'absence d'une preuve historique certaine, comme un inventaire de la bibliothèque royale, d'un billet de commande, la citation d'un témoin direct fiable que nous serions heureux de voir apparaître, et dans l'état actuel des connaissances sur les lectures du roi, il vaut mieux écarter la mention de Poe, qui ne cadre d'ailleurs pas du tout avec ce que l'on sait des lectures de Louis II.

Moralité

Reprenons pour cela le propos de Leopold von Ranke qui devrait servir de fil conducteur à toute recherche historique: "L'histoire ne sera faite que des témoignages directs et des sources les plus authentiques.".

Notes

(1) Nous trouvons la première mention de cette date, plusieurs fois reprise par la suite dans les livres consacrés à Louis II, chez Georg Ludwig Schauenberg dans son livre Im Banne der Rosen, König Ludwig II. in Tagebuchblättern, J. Hubers Verlag, Diessen vor München, s.d., (1924 dans le catalogue de la Bayerische Staatsbibliothek), p. 99. A noter que Schauenberg intitule le récit de la visite de Vanderpoole Poe's Besuch (La visite de Poe).

(2) Nous avons déjà consacré un article à ce numéro. Cliquer ici pour y accéder.

(3) Favard est écrit avec un d final, mais il doit s'agir de Charles-Simon Favart ( Paris, 1710-1792), auteur de pièces de théâtre et d'opéras-comiques français.

(4) Gregorovius (1821-1891) fut un historien allemand qui s'était spécialisé dans l'histoire médiévale de Rome. Il est surtout connu pour Wanderjahre in Italien , le récit d’un voyage en Italie qu’il réalisa dans les années 1850, et le monumental Die Geschichte der Stadt Rom im Mittelalter (Histoire de Rome au Moyen Âge). Il a également écrit la biographie du pape Alexandre VI et de Lucrèce Borgia, ainsi que des ouvrages sur l'histoire byzantine et médiévale d’Athènes.

(5) Karl Ferdinand Gutzkow, né à Berlin, en Allemagne, en 1811 et mort en 1878 est un écrivain, dramaturge et journaliste allemand. Son œuvre et son implication ont joué un grand rôle dans le mouvement Jeune-Allemagne. Ses écrits ont pour thèmes la revendication des droits civils et de la liberté de pensée, la lutte contre les préjudices et contre les religions, l'espérance en un renouveau social et politique.

(6) Karl Frenzel (1827-1914), après des études de philologie, de philosophie et d'histoire, fut l'auteur de romans d'innombrables romans, tels que  Melusine, et de romans historiques, dont un roman sur Charlotte Corday et un autre intitulé La Pucelle. Citons particulièrement son Watteau qui dut intéresser Louis II, féru de l'art du 18ème siècle français.

(7) Augsut Becker étudia à Munich de 1855 à 1859. Il fit partie de l'équipe de l'Allgemeine Zeitung d'Augsburg, et édita de 1859 à 1864 l'Isar-Zeitung. un journal de tendance libérale. Comme romancier, il publia des oeuvres comme Des Rabbi Vermächtnis (1866); Vervehmt (1868), Meine Schwester (1875), un roman qui mettait en scène des personnages dans lesquels on pouvait reconnaître des personnalités de la cour bavaroise. Un de ses romans mettait en scène les faits et gestes de Lola Montez et les événements de 1848.

(8) in Deutsche Geschichte im Zeitalter der Reformation, éd. 1925-1926 t. I, p. 6

Remerciements

Nos remerciements vont particulièrement au Dr Stephan von Minden qui a alimenté notre recherche par l'apport de précieux documents, parmi lesquels figurent des publications d'articles de Lew Vanderpoole aux Etats-Unis, et qui a surtout attiré notre attention sur la traduction de l'éditeur Lutz, qui a introduit l'article de Vanderpoole sur le roi Louis II en Allemagne. Le Dr von Minden nous a également donné son éclairage sur la citation de la lettre d'introduction de Gambetta par Vanderpoole, en nous indiquant que le faussaire avait pu s'inspirer, pour l'invention de sa lettre d'introduction, du récit de Mark Twain, A tramp abroad (1880, chapitre VIII), dans lequel Twain, qui se disait ami de longue date de Gambetta,  prétend avoir assisté à un duel de l'homme politique français.

Nous remercions également le personnel des Archives de la ville de Munich pour son aide aussi aimable qu'efficace dans l'accès aux registres de police (étrangers et résidents).

Enfin, nos remerciements vont au chercheur ludwighien Erich Adami et à Matthias Bienek, l'organisateur des rencontres des Amis du roi Louis II (Freunde König Ludwig II.), qui nous ont tous deux invité à venir prochainement présenter le résultat de nos recherches lors du week-end annuel de l'association à Schwangau. Cette invitation nous a incité à poursuivre notre enquête sur la question de l'imposture littéraire de Lew Vanderpoole et sur les modalités de sa diffusion en Allemagne.


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