Joséphine Schefsky crée Sieglinde à Bayreuth en 1876 |
Joséphine Schefsky (parfois orthographiée Schefzky ou Schefszky), née en 1843 ou 1846, et morte à Munich le 11 novembre 1912, est une chanteuse d'opéra qui a eu une carrière active pendant la seconde moitié du 19e siècle. Possédant une voix puissante de tessiture étendue, elle aborde des rôles à la fois de soprano et de mezzo. Elle est célèbre aujourd'hui pour avoir créé plusieurs rôles dans la première présentation complète de L'Anneau du Nibelung de Richard Wagner au Festival de Bayreuth en 1876.
Dans la chronologie du Ménestrel du 16 novembre 1912, on peut lire la notice suivante:
"Une cantatrice de valeur, Joséphine Schefsky, est morte à Munich, le 10 novembre dernier. Elle avait débuté dans cette ville à l'Opéra de la Cour en 1868 ; elle y resta jusqu'en 1879 ; obligée de partir parce qu'elle déplaisait au roi Louis II, elle chanta successivement à Karlsruhe, à Nuremberg et dans beaucoup d'autres villes. Depuis longtemps déjà, elle avait abandonné le théâtre. Ses principaux- rôles ont été ceux de contralto dans Orphée, Aida, Lohengrin, le Prophète, etc. "
Voici la traduction du récit que donne Frances A. Gerard de leur relation dans son livre The romance of King Ludwig II. of Bavaria; his relations with Wagner and his Bavarian fairy places, paru en 1901 à New York chez Dodd, Mead & company (pp. 161 à 165)
"En présence des femmes, le Roi était toujours embarrassé, et la séductrice la plus intrépide était obligée de s´avouer vaincue. [...] Louis traitait toutes les femmes, quel que soit leur rang, avec la même réserve courtoise. Malgré sa froideur, ou peut-être précisément à cause d´elle,des femmes de tout âge et de toute condition tombaient amoureuses de lui. Des histoires sentimentales remplissent les pages de ses nombreux biographes, et on raconte même qu´une de ses adoratrices du beau sexe avait sauvé la vie du Roi au péril de la sienne propre; mais ce récit, comme de nombreux autres commérages, ne peut être reçu comme fiable.
Quelques légers friselis de scandale avaient circulé au sujet de ses prévenances envers deux des prime donne, Josephine Vogel et Fräulein Schefszky. A la première, qui était une magnifique actrice et interprète de la musique exigeante de Wagner, le roi avait offert son cheval de selle favori. Comme on peut l'imaginer, cette attention avait été considérée «comme la preuve de son admiration pour cette femme, mais très vite il est apparu que le don visait simplement à rendre hommage à son interprétation du rôle de Brünnhilde. Quoi qu'il en soit, le cheval était une bonne publicité pour le théâtre. Chaque fois que le Crépuscule des dieux était annoncé, la maison était sûr d'être bondée, la foule venant tout autant pour voir le cheval du roi exécuter le fameux saut au-dessus des flammes que pour entendre la prima donna. Combien les Munichois, qui avaient "banni le musicien du roi de la ville de Munich" se montraient prodigues en acclamations et en cris de joie!
Les efforts de Fräulein Schefszky s´étaient avérés tout aussi infructueux pour attirer les regards du Roi, bien qu'il lui eut accordé une attention plus personnelle qu´à d´autres; cela était dû à sa voix fameuse, à la tendre sensibilité de son style qui lui procuraient un plaisir infini. On a dit que le Roi l'avait entendue par hasard, et, étant frappé par le timbre délicat de sa voix , il l'avait relevée de son humble position de choriste pour lui offrir le rôle de prima donna du Théâtre de la Cour. Cela encouragea peut-être la chanteuse a s´imaginer qu'elle était considérée avec un tendre intérêt, et elle s´était décidée à voir à quel point son idée était correcte.
La nuit, le Roi avait l'habitude de passer un moment à naviguer sur l'étang, qui faisait partie du jardin d'hiver situé au sommet de la Résidence. On demandait parfois à Fräulein Schefszky de chanter pour Sa Majesté dans le jardin d'hiver, alors qu'il était en bateau sur le lac. Une fois, il daigna l´inviter à faire un tour en barque; la dame, qui avait davantage l´apparence d´une Walkyrie que celle d'une fée, était bien trop lourde pour le petit esquif, qui chavira et la fit tomber dans l´eau. On raconte que cette chute fut en fait une tentative de la chanteuse pour provoquer un geste de tendresse du Souverain. Mais le Roi laissa la dame aux bons soins du matelot et s´en alla bien vite.
Une autre version de cette histoire circule. On y rapporte que Madame Schefsky, s´apercevant que roi était ému par son chant, avait osé lui passer la main dans les cheveux. Indigné d´une telle familiarité qui détruisait le rêve auquel il se livrait, le Roi la repoussa rudement. La poussée la jeta dans le lac. Wagner, qui était de la soirée, dut la repêcher à l´aide d´une gaffe.
Une autre version de cette histoire circule. On y rapporte que Madame Schefsky, s´apercevant que roi était ému par son chant, avait osé lui passer la main dans les cheveux. Indigné d´une telle familiarité qui détruisait le rêve auquel il se livrait, le Roi la repoussa rudement. La poussée la jeta dans le lac. Wagner, qui était de la soirée, dut la repêcher à l´aide d´une gaffe.
De cette façon, les efforts de la prima échouèrent à cause de l´indifférence du Roi. Il ne prit pas la peine de cacher qu´il l´admirait en tant que chanteuse et non pas en tant que femme; elle avait toutefois une certaine influence sur le Roi qu´elle perdit par sa propre faute.
Il était devenu habituel que de temps en temps un chanteur fit de somptueux présents au Roi qu´il acceptait, il était convenu que le Roi les payerait par la suite. Cet arrangement, qui a souvent lieu entre parents et enfants à Noël [...], frappe par son caractère étrange et inhabituel entre un Roi et un chanteur. Bien évidemment, Fraulein Schefszky était déterminée d´obtenir quelque chose pour elle-même dans la transaction.
Un Noël, elle présenta à son royal protecteur un tapis coûteux, dont il fut très satisfait. Il l´en remercia chaleureusement et désira effectuer le remboursement sur-le-champ. Son secrétaire, toutefois, étonné du prix élevé de l'article, ordonna une enquête dont il ressortit que Schefszky avait pris une forte commission sur la transaction. Le Roi fut tellement dégoûté de la bassesse et de l´ingratitude de cette tromperie, qu´il chassa la chanteuse du Grand Opéra, ordonnant toutefois qu´elle fut payée pour la durée de son engagement. [...]
Il était devenu habituel que de temps en temps un chanteur fit de somptueux présents au Roi qu´il acceptait, il était convenu que le Roi les payerait par la suite. Cet arrangement, qui a souvent lieu entre parents et enfants à Noël [...], frappe par son caractère étrange et inhabituel entre un Roi et un chanteur. Bien évidemment, Fraulein Schefszky était déterminée d´obtenir quelque chose pour elle-même dans la transaction.
Un Noël, elle présenta à son royal protecteur un tapis coûteux, dont il fut très satisfait. Il l´en remercia chaleureusement et désira effectuer le remboursement sur-le-champ. Son secrétaire, toutefois, étonné du prix élevé de l'article, ordonna une enquête dont il ressortit que Schefszky avait pris une forte commission sur la transaction. Le Roi fut tellement dégoûté de la bassesse et de l´ingratitude de cette tromperie, qu´il chassa la chanteuse du Grand Opéra, ordonnant toutefois qu´elle fut payée pour la durée de son engagement. [...]
Cette histoire fit littéralement le tour du monde! Voici encore une autre version de cet épisode extraite du supplément d´un journal néo-zélandais, le Oamaru Mail du 19 novembre 1904 (page 7). Dans cet épisode le Roi est assis dans une barque tirée par un cygne mécanique en compagnie de Madame Schefszky et de Wagner. La dame après avoir chanté passe sa main dans les cheveux du Roi qui la repoussa rudement. La barque chavira et ils tombèrent tous trois dans l´eau. Le roi sortit de l´eau et partit sans se préoccuper de ses compagnons. Wagner repêcha la dame à l´aide d´une gaffe. Voici l´extrait en original anglais:
[...]It was frequently Ludwig's pleasure to listen to the opera singers, engaged for Wagner's operas, as he glided noiselessly over the- lake in the winte-r garden he had constructed at enormous expense on the top of the Royal residence at Munich, and which was so large that it extended along the whole length of the west wing -of the palaee. Interiorly its color, splendor, and perfume made it seem ail enchanted place. Countless roses hung from its high arched roof: thousands of lights glowed softly from under the leaves of palms, plantains, and other tropical trees, from its blossoming shrubberies rose the slender minarets ancl glittering cupolas of kiosks; paroquets flew from branch to branch, and waterfalls splashed musically. Here is a golden boat shaped like that in which Lohengrin appears, and propelled by a mechanical swan. His Majesty, clad in silvc-r armour like that enchanted knight, spent the hours while the world slept, listening to si-ringed instruments or to singers concealed behind the foliage. One opera singer, whose superb voice had won his enthusiastic admiration, was Fraulein Schefszky, in whose portly person beat- a scheming heart-, and who had sent him verses hinting of her ardeoit- love. She was invited to sit with Ludwig and Wanner in the boat, and in a moment of silence succeeding her song, while his Majesty. lost in reverie, stared into space, the lady leant forward and gently passed her fingers through his hair, when, shocked and disgusted by such familiarity, he pushed her away so roughly that the boat upset and flung all three into the lake. 'Die King clambered up the bank, a.nd strode away without turning to see whatbecame of his companions, and the prima donna, drenched and disillusioned, was rescued by the composer with the assistance of a boat-hook.[...]
La carrière de Josephine Schefsky (Wikipedia)
Elle fait ses débuts professionnels en 1868 l'opéra à l'Opéra d'État de Bavière dans le rôle d'Orphée de l'Orfeo ed Euridice de Christoph Willibald Gluck. Elle est alors l'une des artistes majeures de cette maison jusqu'en 1883 et est l'interprète favorite de Louis II. Elle est notamment la créatrice du rôle d'Amneris à la première munichoise d' Aida de Giuseppe Verdi en 1877.
Wagner entend Josephine Schefsky à Munich ; il est très impressionné par ses capacités vocales et dramatiques. Il l'invite à prendre part à la première présentation du cycle complet de l'Anneau au Festival de Bayreuth en 1876. Elle y crée le rôle de la deuxième Norne dans Götterdämmerung le17 août 1876 et interprète Sieglinde dans Die Walküre le 14 août 1876.
Sa voix est un pur ravissement, quoique cette forte personne ressemble à une servante de brasserie. Mais une voix si convaincante atteint presque aux régions de l'idéal. Le roi la fait chanter chez lui, derrière un écran de plantes vertes. Un jour, Joséphine apporte au roi pour sa fête un beau tapis d'Orient, et, selon l'usage, accepte que la cassette royale lui en rembourse le prix. Mais cette maladroite croit pouvoir profiter des circonstances pour surcharger la note. La ruse est éventée ; Louis entre dans une colère terrible : elle est chassée du Théâtre de la Cour.
En 1882, elle se rend au Royaume-Uni où elle interprète Magdalena dans Die Meistersinger von Nürnberg de Wagner au Théâtre Royal de Drury Lane à Londres sous la direction de Hans Richter. Elle chante à l'Opéra national du Rhin et de l'Opéra d'État de Vienne en 1883-1884. Elle passe ses dernières années sur scène à l'Opéra d'État de Berlin et l'Opéra de Francfort. Parmi ses nombreux rôles, on trouve Azucena dans Il trovatore de Verdi, Fidès dans Le prophète de Giacomo Meyerbeer, Frau Reich dans Die lustigen Weiber von Windsor, Gertrude dans Hamlet d'Ambroise Thomas, Maddalena dans Rigoletto de Verdi, et Sieglinde dans le Ring.
À partir de 1890, elle enseigne le chant à Munich. Elle y meurt en 1912 à l'âge de 69 ans.
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