Lauréat du Concours international de musique ARD 2014, le violoncelliste Bruno PHILIPPE y a remporté le troisième prix ainsi que le prix du public . Bruno PHILIPPE est né en 1993 à Perpignan, il a commencé à jouer du violoncelle à l'âge de cinq ans avec Marie-Madeleine Mille. Il a déjà remporté en novembre 2011 le Troisième Grand Prix ainsi que le Prix du meilleur récital au Concours international André Navarra.
Munichandco: Bruno Philippe, vous venez de vous qualifier pour la finale du Concours international de musique ARD dans la catégorie 'violoncelle', un concours pour lequel 69 candidats avaient été sélectionnés. Voudriez-vous évoquer votre parcours personnel? Vous avez commencé à pratiquer votre instrument dès l'enfance. Qu'est-ce qui attire un enfant vers la musique, et qu'est-ce qui vous a poussé à faire le choix du violoncelle ? Etes-vous issu d'une famille de musiciens ? Ensuite, quel fut votre parcours de formation?
Bruno Philippe: Tout d'abord, le simple fait d'avoir été sélectionné pour le concours était déjà une réussite en soit. Pouvoir participer à un concours international aujourd'hui est un grand luxe : les présélections sont très difficiles et de plus en plus de monde se présente. Ce concours est particulièrement difficile et éprouvant de par son format (4 tours, plus de trois heures de musique à apprendre!) et tous les candidats présents sont d'un niveau exceptionnel. Je suis tellement ravi d'avoir pu jouer tout mon programme, particulièrement le concerto de Dvorak (pour la première fois..!) avec un orchestre aussi merveilleux. J'ai commencé le violoncelle à 5 ans au conservatoire de Perpignan (sud de la France) dans la classe de M-M Mille et Y. Chiffoleau. Mes parents n'étaient pas musiciens mais très mélomanes. Ma grande sœur a demandé à commencer le violon et j'ai suivi ses traces en sollicitant mes parents pour débuter le violoncelle. J'ai ensuite à l'âge de 13 ans étudié au conservatoire régional de Paris pendant un an avec Raphael Pidoux avant d'intégrer le CNSMDP dans la classe de Jérôme Pernoo où je viens d'obtenir un Master.
Munichandco: Vous jouez depuis 2012 un violoncelle du célèbre luthier vannetais Franck Ravatin, prêté par le Mécénat Musical Société Générale. Pourriez-vous expliquer aux non initiés la relation que vous entretenez avec cet instrument, quelles en sont les qualités particulières ?
Bruno Philippe: Ce violoncelle moderne est exceptionnel. Aujourd'hui, les luthiers contemporains font un travail exceptionnel. Cependant, je joue maintenant (y compris pendant le concours) sur un instrument italien de 1694 probablement fabriqué par Matteo Goffriler. Je trouve ce violoncelle particulièrement agréable à jouer et il me rend heureux à chacun de mes concerts!
Munichandco: Pourquoi vous être présenté au Concours international de l'ARD? Dans votre discipline, quelle est l'importance de ce concours au niveau international? A quels autres concours peut-il être comparé?
Bruno Philippe: Quand on est un jeune musicien, un concours est un tremplin, un moyen de se "faire remarquer". C'est probablement comme tous les autres violoncellistes inscrits la raison pour laquelle j'ai voulu y participer. Ensuite, un concours, c'est aussi et surtout un moyen de se dépasser, de travailler en profondeur sur une longue période un programme très riche. L'ARD de Munich est à mon avis un des concours les plus réputés pour notre discipline. Nous n'en avons pas tellement finalement (moins que pour le violon ou le piano par exemple). On doit pouvoir le mettre au même rang que le concours Tchaikovsky de Moscou ou que le concours Rostropovich de Paris qui sont tous deux des concours en quatre tours.
Munichandco: Quelle stimulation apporte la participation à un tel concours? Relever ce type de défi nourrit-il votre travail de musicien?
Bruno Philippe: Participer à ce concours est un véritable défi ! La préparation est l'étape la plus importante du concours finalement. Ça peut sembler banal, mais que l'on gagne ou pas, si l'on s'est bien préparé, le travail finit toujours par porter ses fruits, ce n'est jamais une perte de temps. Mais ces "défis" sont des périodes très éprouvantes et je ne suis pas particulièrement un "mordu" de compétition. Comme je le disais précédemment, c'est un très bon moyen de se faire entendre et juger par des violoncellistes mondialement reconnus mais ce n'est pas une fin en soit. Je pense qu'il faudrait être capable de fournir le même travail avec ou sans concours. C'est assez idyllique mais je compte bien essayer d'y arriver !
Munichandco: Vous avez conquis le public tout au long du concours, et recueillez un énorme succès. A votre avis, quels sont les éléments qui suscitent un tel engouement ? Pourriez-vous tenter d'analyser les spécificités et les qualités de votre interprétation des oeuvres pour violoncelle? Quelles qualités vous efforcez-vous de développer ? Vous sentez-vous soutenu par le public munichois?
Bruno Philippe: Merci! Je pense que ce qui a pu séduire le public, c'est le fait que j'ai tenté d'envisager chaque tour comme un concert et non comme un concours. On ne joue pas que pour un jury et le jury lui-même est avant tout public lui aussi! Je ne pense pas être capable d'analyser mes "qualités d'interprétation du répertoire pour violoncelle" mais je suis très heureux de savoir que j'ai peut-être rendu le public aussi enthousiaste que moi. J'étais très stressé entre chaque passage mais au moment de jouer, j'éprouvais toujours un certain plaisir sur scène et je suis ravi que ça se soit ressenti! Le public munichois a été adorable avec moi et j'espère bien avoir la chance de rejouer souvent pour eux!
Munichandco: Parmi les trois concertos imposés par le Concours ARD pour la finale ( des oeuvres d'Antonín Dvořák, Edward Elgar et Dimitri Chostakovitch), quel est le concerto que vous avez choisi d'interpréter et quelles sont les raisons de votre choix? A vos yeux, de quelles qualités un violoncelliste doit-il faire preuve pour interpréter ce concerto ? Quels sont vos choix d'interprétation ?
Bruno Philippe: J'ai choisi le concerto de Dvořák parce que depuis tout jeune, c'est mon Everest du répertoire pour violoncelle et orchestre. Cette œuvre absolument magnifique est un bijou d'orchestration et elle est particulièrement jouissive à jouer. C'était en plus l'occasion de jouer ce concerto pour la première fois et grâce à l'orchestre magique qui était à mes côtés, je m'en souviendrai toute ma vie. J'étais très ému durant ce concert de finale. Ce concerto est difficile (peut-être le plus dur avec Schumann à mon goût), d'une part techniquement mais il est aussi très long et il demande une implication physique de chaque instant. Dans mon travail, j'ai tenté de m'émanciper de la tradition qui pèse sur ce concerto et de revenir à la partition, au texte pour finalement mieux pouvoir m'en éloigner par la suite. Il me tarde déjà de pouvoir le rejouer!
Munichandco: Quant à l'oeuvre imposée de Tobias PM Schneid lors de la demi-finale, avez-vous rencontré des difficultés lors du déchiffrage de la partition? Dans quelle optique avez-vous préparé votre interprétation? Avez-vous eu le sentiment de participer à la création mondiale de l'oeuvre? Connaissiez-vous déjà l'oeuvre de ce compositeur avant le concours et, dans l'affirmatrive, aviez-vous déjà eu l'occasion d'en jouer ?
Bruno Philippe: J'ai eu beaucoup de mal (comme pas mal de candidats avec lesquels j'ai discuté) avec la pièce de Schneid. Je ne doute pas de sa qualité mais je pense cependant que dans le cadre d'un concours, celle-ci était trop dure et trop longue. Quand on a un programme de plus de trois heures, commencer une nouvelle pièce aussi difficile deux mois avant le début du concours est un peu déprimant..! Peut être que j'y reviendrai un jour si je rencontre le compositeur et qu'il m'en dit un peu plus sur sa pièce.
Munichandco: Si vous vous mettez un instant à la place du jury, quels sont selon vous les critères d'appréciation des membres d'un jury pour estimer l'interprétation d'une violoncelliste?
Bruno Philippe: (...) Je n'en ai aucune idée! Il y a beaucoup de critères propres à chacun qui doivent rentrer en compte mais je suppose qu'il doivent être sensibles au fait de se sentir autant public que juge. J'admire et je respecte chacun des membres du jury. Je suis très honoré qu'ils m'aient permis d'accéder à la finale et donné un prix.
Munichandco: Quelles pourraient être les répercussions de votre arrivée en finale du concours ARD 2014 sur votre carrière ?
Bruno Philippe: Je ne sais pas encore mais j'espère la possibilité de faire plus de concerts et de pouvoir ainsi transmettre ma passion pour la musique à plus de monde! Quoi qu'il advienne, ce fût une expérience incroyable et je tiens à remercier tous mes proches pour leur soutien, et également le public du concours pour m'avoir décerné leur prix qui est pour moi la plus belle récompense!
Munichandco: Merci, Bruno Philippe, d'avoir accepté et pris le temps de vous livrer à cet entretien. On aura encore l'occasion de venir vous écouter cette semaine lors des concerts des lauréats qui auront lieu les 17,18 et 19 septembre à Munich, et qui sont par ailleurs retransmis en live à la radio (BR-Klassik) et en video-stream sur le site de BR-Klassik.
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