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lundi 11 mars 2013

Didon et Enée en Afrique au Théâtre Cuvilliés

Didon Stephanie Krug (c) Hermann Posch
L'ensemble pour la musique ancienne et moderne  Cosi facciamo vient de reprendre au Théâtre Cuvilliés sa création de 2006 du Didon et Enée de Purcell , rebaptisé Didon et Enée en Afrique.  Ces dernières années, le public munichois avait déjà pu apprécier le travail de ce groupe de musiciens et de chanteurs placés sous la direction musicale de Hans Huyssen dans d'autres opéras comme l'Orfeo de Monteverdi (2008) et Ariodante de Haendel (2011).  

Le titre de l'oeuvre revisitée y insiste, l'action se passe sur les côtes africaines, à Carthage. Cosi facciamo repense l'opéra de Purcell en y ajoutant la confrontation en  miroir de la musique arabe. De part et d'autre de la scène l'orchestre baroque qui interprète la partition de Purcell sur des instruments anciens et deux musiciens d'origine irakienne (Saad Tahir, Bassem Hawar ou Roman Bunka) qui jouent et chantent, en prolongation ou en dialogue avec la musique de Purcell, des mélodies mâqam avec des instruments de la musique arabe traditionnelle tels le djoze, l'oud, le darbuka, le req ou le daf, accompagnés au luth par l'excellent Joel Frederiksen.  C'est là tout le paradoxe et l'originalité de ce groupe de musiciens: issus de la formation classique la plus pointue (ses fondateurs ont notamment participé aux séminaires de Nikolaus Harnoncourt au Mozarteum de Salzbourg en 1998, où ils se sont rencontrés), ils organisent le dialogue et le contrepoint de deux musiques, renouvellent le genre et contribuent à une réflexion musicale sur un monde contemporain en pleine (r)évolution que l'actualité mouvementée dramatique du monde arabe met particulièrement en lumière. Qu'on ne se trompe pas sur le propos, l'expérience n'est pas politique, mais bien celle d'une fascination musicale.La musique de Purcell et les mélodies mâqam se complètent et se font écho, les plaintes, la douleur et l'agonie de Didon s'expriment dans des modulations similaires et différentes à la fois avec un effet de dialogue musical des plus réussis.

Stéphanie Krug (c) Sybille Thomé

La mise en scène est a minima. Les sables des rivages africains reçoivent les traces des pas d'Enée qui n'arrive à Carthage que pour mieux en repartir et le corps douloureux et prostré de Didon qui de l'amour connaîtra surtout les affres. Heike Hannefeld joue notamment sur les effets d'un théâtre d'ombre grandeur nature décalqué sur une grande toile de fond de scène qui en fin de deuxième partie sera relevée pour laisser place aux lumières aveuglantes d'une série de néons parallèles  suspendus à la verticale dans un effet à la Dan Flavin. Sa direction d'acteurs privilégie souvent les expressions hiératiques qui soulignent la solennité majestueuse de la musique, c'est le choix assez conventionnel et peut-être un peu trop figé et stéréotypé de l'emphase corporelle dans l'expression des affects de colère, de fureur et de désespoir.

Mais ce sont surtout la musique et le chant qui sont privilégiés, comme en témoigne la présence en scène des deux groupes de musiciens qui encadrent le déroulement de l'action. Les chanteurs sont tous de belle tenue, la Didon de Stéphanie Krug recevra des applaudissements des plus nourris. Le public sort manifestement enchanté de cette expérience musicale qui conduit la musique baroque sur les rivages de la modernité.

Direction musicale Hans Huyssen
Mise en scène et décors  Heike Hanefeld
Costumes de Barbara Anna Keiner
Danses d' Élodie Lavoignat 
Lumières Gerrit Jurda.

Avec Stephanie Krug (Soprano – Didon), Christian Sturm (Tenor, Enée), Beate Gartner (Soprano), Monika Lichtenegger (Soprano), Martina Koppelstetter (Mezzosoprano), Joel Frederiksen (Basse et luth), Anton Leiss-Huber (Tenor ).

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