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mardi 11 décembre 2018

Un conte de fées, invraisemblable et charmant , le portrait de Louis II de Bavière par Catulle Mendès en 1869

C'est curieusement avec ce conte que Catulle Mendès, - séjournant à Munich en août 1869 pour assister aux répétitions de l'Or du Rhin de Wagner, - commence un article consacré à l'Exposition internationale des Beaux-Arts de Munich. L'article intitulé  " Le salon universel de Munich " fut publié dans la revue parisienne L'Artiste (Revue du XIXe siècle. Histoire de l'art comteporain) du 1er septembre 1869. C'est au motif que que le jeune roi est un ami des arts qui "raffolait des belles peintures" que Mendès en fait le portrait en entame de son article.

LE SALON UNIVERSEL DE MUNICH

Un conte de fées, invraisemblable et charmant ! Dans cent ans, ceux qui le conteront seront traités de songe-creux. « Il y avait une fois, dira quelque poëte épris des temps passés, il y avait une fois un roi qui était jeune, bien qu'il eût déjà vingt-quatre ans. Parce que tout devait être frais et printanier autour de lui, il était né dans un burg qui était appelé le Burg des Nymphes, et il avait eu pour gouverneur un savant homme qui se nommait le comte La Rosée. Il n'était ni dédaigneux ni ennuyé, quoiqu'il fût puissant et que tous les plaisirs s'offrissent à lui. Beau, il l'était au point de troubler les rêves de toutes les jeunes filles de son royaume, mais il ne troublait que leurs rêves. Les fées-marraines qui l'entourèrent dès le berceau lui avaient donné cette rare et admirable faculté : l'intelligence du Beau. Tous les arts lui furent chers. Sous les grands arbres d'un parc, ou dans la solitude discrète d'une salle aux tentures bleues, il employait de longues heures à relire les poëte aimés. Il lisait bien , en s'interrompant quelquefois , ainsi que lisent les rêveurs. Il raffolait des belles peintures. Souvent il montrait à un peintre quelques vers d'un poëte , et lui disait « Peignez cela. » De là des tableaux puissants ou charmant,. Il aimait à monter à cheval dans les montagnes. Ceux qui le voyaient passer, ceux-là mêmes qui ne le reconnaissaient pas , criaient : « Vive le Roi ! » à cause de sa haute taille et de son front superbe et doux. Il habitait des burgs enchantés, tantôt sur les bords d'un lac où se mirent des collines, tantôt dans les gorges verdoyantes et neigeuses d'un mont. Parce qu'il aimait le beau, il faisait le bien. Sa clémence domptait les méchants. II avait une façon de parler, qui était cause qu'on l'aimait. Il était la bonté, de même qu'il était la beauté. Un jour, il avait disparu ; on le chercha longtemps ; on le trouva dans un village lointain, attablé chez une vieille femme qui avait été sa nourrice. Ainsi vivait ce jeune duc Thésée. Mais ni sa passion pour l'art, ni les soins de la charité ne le détournaient des affaires de l'État. Quand il monta sur le trône, la situation était sombre autour de lui ; il l'éclaircit. Ses ministres, gens habitués aux affaires, s'étonnaient de l'expérience de ce jeune homme. Avait-il longtemps étudié les choses politiques ? On ne savait. Mais il résolvait sans effort les questions les plus difficiles. Il voyait au loin, comme un jeune aigle. Et ses peuples l'adoraient parce qu'il était beau, l'aimaient parce qu'il était, bon, le respectaient parce qu'il était juste. Ainsi, dans cent ans, parlera quelque poëte amoureux des légendes, et on lui répondra « Vous voulez rire ! Un tel roi n'a jamais existé » . On aura tort. Il existe, et c'est lui qu'on nomme Louis II, roi de Bavière. [...]

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