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samedi 10 mars 2018

In memoriam: les derniers jours du roi Maximilien de Bavière † 10 mars 1864

Chapelle funéraire du roi Louis II de Bavière,
d'après un dessin de Karl Appold

Pour commémorer la mémoire du roi Maximilien II de Bavière, décédé le mars 1845, nous reproduisons ci-dessous le récit des derniers jours du roi par le vicomte Vincent Victor Henri de Vaublanc (1803-1874) dans Maximilien II Roi de Bavière: fragment de souvenirs intimes, publié en 1867 à Munich par l'Imprimerie de la cour royale (J. Rösl). 

Le vicomte Vaublanc, qui fut pendant trente ans proche ami et conseiller du roi, cite dans son ouvrage (p.13) la dernière strophe du poème Au Prince royal de Bavière voyageant en Grèce écrit pour le prince Maximilien par Alphonse de Lamartine en 1833 après qu'il eut rencontré le prince alors en voyage en Grèce:

Quand l'homme obscur finit son court pèlerinage 
Sous l'herbe du cercueil il dort impunément; 
Mais la terre de vous demande témoignage, 
Et la tombe d'un roi doit être un monument.

En 1863, l'état de santé du roi nécessite un long séjour en Italie, mais la situation politique internationale, extrêmement tendue,  le contraignit à rentrer en Bavière: 

[...]Aux approches d’un orage politique précurseur de cette formidable tempête dont nous sortons a peine, ‘son peuple inquiet l'avait redemandé avec instance. Toujours consciencieux, de Rome où il était, il répondit par le télégraphe: "qu’il connaissait ses devoirs de roi" et il quitta l’Italie où il jouissait d’un repos devenu pour lui bien nécessaire! Il revint et donna a son peuple ce qui lui restait de vie. 

Deux mois et une vingtaine de jours s’étaient écoulés depuis ce retour du roi Maximilien a Munich. Il entrait dans sa cinquante-deuxième année. De graves questions s’agitaient entre lui et l’archiduc Albert, envoyé par l’Autriche, quand il commença à se plaindre d’un certain malaise. Il prit part encore le lundi soir (7 mars 1864) à la réunion qui avait lieu chez la reine, mais il se retira de bonne heure. Le 8, il garda la chambre, et le lendemain le prince royal parut seul au dîner où était invité l’archiduc Albert.

Bientôt la promptitude alarmante d'une indisposition, devenue en peu d’heures une maladie sérieuse, surprit généralement; mais les germes inaperçus de cet état dataient de loin. Le public ne fut instruit du danger que par la fermeture subite du théâtre, le mercredi 9 au soir. S. M. la reine ne quitta pas le chevet du malade. Tous les princes de la famille royale, les princesses, l’archevêque de Munich et les ministres, le service du roi, les médecins en consultation permanente, impuissants et découragés, tous veillaient dans les larmes et dans l’anxiété, et puis la nouvelle fatale se propageant et se confirmant à mesure que le mal s'aggravait, une masse considérable de citoyens de tout âge et de tous rangs, remplit peu a peu les vastes salles de la résidence. Là, dans les longs corridors, sur les escaliers, dans les chambres d’attente et les salons de service, tout demeura ouvert; plus de consigne pour les gardes et les sentinelles, plus d’uniformes pour les offices de cour, mais d’humbles vêtements, présage de deuil, des pas précipités, des visages pâles. Les portes béantes du palais ne se fermèrent ni le jour ni la nuit, et toute la nuit et tout le jour, tandis que les dernières heures de cette vie royale s’achevaient péniblement, une foule désolée, pauvres et riches, étrangers et Bavarois, les derniers du peuple comme les premiers de la nation, se pressait jusqu’aux environs du lit de douleur, sollicitant avec les instances d’un amour et d’un respect touchants, quelque nouvelle de l'état de leur roi; un peu d’espoir seulement, un peu de répit! 

Et le mal impitoyable, qui consistait dans l’affaiblissement des fonctions du coeur, poursuivait son œuvre, étreignant les pauvres membres du roi, sans douleurs vives pourtant, sans lui ôter sa présence d’esprit et son entière soumission à la volonté de Dieu. Car la religion, vers le milieu de la nuit, vint le soulager par ses divins adoucissements et le fortifier pour la lutte de la dernière heure. 

Elle vint trop tôt cette heure d’agonie publiée par les cloches des églises. Les prêtres se tenaient en prières au chevet du malade, et la famille royale l’entourait. D’une main pieuse son fils aîné lui ferma les yeux. Il héritait de la couronne et fut proclamé roi solennellement le même jour. 

Ce jeudi 10, avant midi, le maréchal de la cour parut dans le premier salon et annonça que tout était fini. Aussitôt cette multitude, comme une seule et grande famille éplorée, s’agenouilla spontanément, et pria dans le silence, pour l’âme de celui qui avait été son père, et pour l'avenir du royaume. Après quoi l’accès jusqu’au lit royal devint libre pour tous. Chacun y put contempler une dernière fois ce noble visage, se reposant avec sérénité, dans le calme éternel, des troubles et des misères de la vie. 

La foule enfin commença a se retirer lentement, plusieurs demeurant incrédules devant cet appel si soudain de la mort, et conservant encore en eux, mais vainement, quelque chose qui ressemblait a l’espérance. 

Ah! l’on vit bien alors ce qu’était un bon roi, régnant sur un bon peuple. Cette séparation, aux portes de l’éternité, du souverain et des sujets, fut baignée de larmes, et quand le cercueil s'est fermé sur lui le culte loyal et silencieux de cette chère mémoire a commencé dans bien des coeurs! 

Puissent ces lignes, tracées par une main que le roi Max a daigné plus d’une fois serrer dans la sienne, être lues de quelques uns de ceux qui l’ont connu, l'ont servi, et aimé. Ces lignes ne forment qu’une faible et insuffisante ébauche d’une belle vie, mais nous allons rappeler ici, pour les amis du roi Macs, des paroles qui valent mieux  que tout ce que nous avons pu dire. 

Elles sont extraites de son acte testamentaire (16 décembre 1851), et nous révèlent son cœur tout entier: 

,,J’adresse a tous ceux qui m’ont gardé fidélité et amour mes remerciements les plus ,chauds et les plus profonds. Je pardonne du fond de mon âme a tous ceux qui, volontairement ou involontairement, ne furent ,pas ainsi a mon égard. Que ceux qui ont ,eu a se plaindre de moi veuillent tous aussi ,me pardonner; de tout cœur je réclame ce pardon. Que le Tout-puissant, dans l’avenir et à jamais, prenne en sa garde sainte mon bien-aimé, mon brave et excellent peuple Bavarois, et lui accorde sa plus riche et sa plus entière bénédiction! Dès ma jeunesse, je l’ai fidèlement porté dans mon cœur. Il était le but de mes travaux, de mes soucis, de mes peines et de mes joies; son bonheur était le mien. Mon plus sérieux, mon plus ardent effort est, et sera toujours, de faire progresser de toutes mes forces, le ,bien être matériel et moral dans ma patrie; d’assurer a la Bavière parmi les nations, le rang auquel elle a droit par sa position, ainsi que par ses vieilles et glorieuses annales. Mon amour pour elle subsistera au-delà de ma vie. Pour mon peuple j’agirai et je prierai, aussi longtemps qu’il me sera donné d’agir et de prier.“ 

Dans la devise adoptée par le roi Maximilien se retrouve le résumé de ces nobles pensées: Dieu et mon peuple! [...]



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