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vendredi 7 octobre 2016

Première munichoise du Bal des vampires au Deutsches Theater



Pour les premières munichoises du Bal desVampires (Tanz der Vampire), le Deutsches Theater de Munich a organisé pas moins de deux soirées de premières, tant l' intérêt était grand pour la nouvelle production de la société Stage Entertaintment. Nombreuses étaient les célébrités du monde du spectacle et de la télévision à défiler sur le tapis rouge éclairé aux flambeaux et entouré de vampires arborant teint caverneux, crocs sanguinolents et ongles longs et crochus.

Au commencement, en 1967, était un film de Roman Polanski qui fait à présent partie des grands succès de l´histoire du cinéma: Le bal des vampires (The Fearless Vampire Killers or Pardon Me But Your Teeth Are In My Neck). Tout le monde se souvient sans doute de cet film parodique ébouriffant dans lequel Polanski interprète lui-même et rôle d´Alfred et où Sharon Tate compose une Sarah inoubliable. 

La comédie musicale tirée du film et que Roman Polanski a lui-même mise en scène, en spécifiant bien qu'il ne s'agit pas d'un remake du film mais d´une nouvelle création, est née en octobre 1997 au Raimund Theater de Vienne.  Le spectacle s'est ensuite produit en Allemagne, à Stuttgart, Hambourg, Oberhausen et Berlin puis on octobre 2005, en Pologne à Varsovie sous le titre Taniec Wampirów, en juin 2007 à Budapest sous le titre Vámpírok Bálja, en septembre 2010 en Belgique néerlandophone au Stadsschouwburg d'Anvers sous le titre Dans der Vampieren et à l'automne 2014, dans une version traduite en français et remise en scène par Roman Polanski au théâtre Mogador de Paris. Depuis sa création, cette comédie musicale a aussi été montée aux Etats-Unis à Broadway, en Estonie et en Finlande, au Japon et en Russie. C´est dire que Munich se réjouit de pouvoir enfin l'accueillir. En 2015, elle a été nommée aux Globes de Cristal dans la catégorie Meilleure Comédie Musicale et la production parisienne s'est vu attribuer la même année le Molière de  la création visuelle. . Depuis 1997, plus de 7.500.000 spectateurs ont vu Le Bal des Vampires, qui a déjà été produit dans douze pays et traduit en dix langues. L´an prochain, on fêtera le 50ème anniversaire du film et le 20ème de la comédie musicale.

L'action

Le professeur Abronsius, une espèce de Tournesol aussi décati qu'illuminé a organisé avec le meilleur de ses étudiants, le dénommé Alfred, une expédition en Transylvanie ayant pour but de prouver l'existence des vampires. On est en hiver, lorsque le rideau se lève, et un Alfred terrifié, perdu dans la tempête de neige, est à la recherche de son mentor apeuré  étudiant apeuré est à la recherche de son compagnon qu'il finit par retrouver complètement gelé et dont il charge le corps sur son dos.

Ils sont recueillis dans une auberge où des aubergistes juifs, Chagal et sa femme Rebecca, les accueillent et s´empressent de dégeler le professeur qui revient à la vie. Dans l´auberge, le professeur et son étudiant trouvent un premier indice de la présence de vampires: l'abondance d'ail. Mais lorsque ils interrogent les clients et les aubergistes, ils se trouvent face à un mur de déni et le patron refuse même de reconnaître la présence d'un château à proximité.

Alors que Chagal leur montre leur chambre et leur salle de bain, il y trouve sa fille Sarah, une demoiselle de toute beauté, qui se prélasse dans le tub. Alfred tombe amoureux aussitôt de la charmante jeune fille, qui  de l'aubergiste. Mais le jeune étudiant a un rival de taille, le Comte von Krolock, un vampire qui a déjà jeté son dévolu sur la donzelle. Krolock enlève la jeune fille en l'appâtant avec des bottes et un châle rouges qu' est venu déposer l'inquiétant serviteur de Krolock, un horrible Quasimodo répondant au nom de Koukol, que l'on avait déjà vu venir chercher des bougies à l'auberge.

La nuit, Chagal est vampirisé et trouvé mort, mais sa femme refuse que le professeur lui transperce le coeur avec un pieu, ce qui lui assurerait de ne pas se transformer en vampire à son tour. Plus tard, l'aubergiste, devenu vampire, plante ses crocs dans la gorge de sa servante Magda.

Le professeur et son assistant se mettent en route vers le château du Comte pour essayer de sauver Sarah... Dans la lutte entre les deux rivaux, qui emportera le coeur de Sarah, c´est ce qu'on découvrira au Deutsches Theater dans cette comédie musicale qui voit sa tension culminer dans le fastueux bal des vampires et qui se termine dans un final étourdissant.

Faut-il le souligner, la mise en scène de Roman Polanski fait du Bal des Vampires une des comédies musicales qu'on ait à ce jour pu voir à Munich. Le livret de Michael Kunze se mesure à la même aune, les dialogues sont composés avec une finesse psychologique qui se marie avec bonheur au  sens de la répartie et du rebond qui appartiennent au genre de la comédie. Là aussi on se trouve en présence d´un des meilleurs livrets jamais composés pour une comédie musicale. Ajoutons à cela, fait assez rare pour une production en tournée, des décors ingénieux et luxuriants admirablement asssociés aux projections vidéos, dus tous deux à William Dudley, les costumes, les maquillages et les coiffures absolument fabuleux de  Sue Blane, qui rend bien l'atmosphère d'un shtetl des pays de l'est avec ses aubergistes qui semblent sortis d'un tableau de Chagall (le nom de l'aubergiste y invitait) ou l'ambiance élisabéthaine des parures du bal des vampires, et les chorégraphies envoûtantes de Dennis Callahan qui exige d'étonnantes performances de gymnastes de ses danseurs. Le design des lumières (Hugh Vanstone) et du son (Thomas Strebel) participent de la même perfection. Rarement a-t-on vu  un spectacle aussi abouti.

L' interprétation

De nombreuses chansons et morceaux musicaux viennent d'œuvres antérieures de Jim Steinman: Ainsi, une des chansons les plus célèbres, qui est aussi un des leitmotivs de la comédie musicale, Totale Finsternis (Eclipse totale), correspond à la chanson Total Eclipse of the Heart, un énorme succès de Bonnie Tyler qui date de 1983, Unstillbare Gier (Insatiable avidité) rappelle une chanson de  Meat Loaf et le final vient de la bande originale du film ,Les Rues de feu, les  morceaux Gott ist tot (Dieu est mort), Einladung zum Ball (Invitation au bal) et Tanzsaal (Salle de danse) sont basés sur la chanson Original Sin qui se trouve sur l'album du même nom du groupe Pandora's Box, Ewigkeit (Éternité) et Vor dem Schloss (Devant le château) viennent toutes deux d'un autre musical de Steinman intitulé Neverland. La liste est longue et la pratique steinmanienne de l'auto-citation fait du Bal des Vampires comme un compendium de son oeuvre, ce qui est en soi un facteur de réussite puisque d'emblée le public se retrouve avec délectation en territoire connu. Pour cette comédie musicale, Steinman a réussi à rendre avec opulence l'atmosphère et l'esprit du film, avec ses ballades rock entraînantes, son comique renversant et la fulgurance de sa musique pour les parties dansées:

La musique était prévue à l'origine pour un orchestre d´une trentaine,de musiciens, qui ne sont malheureusement plus que dix dans la production de Stage entertainment, qui compense cette économie de moyens par l'époustouflante qualité de l´ingéniérie du son, une des perles du Deutsches Theater depuis sa récente rénovation. Cependant, même avec la technique la plus merveilleuse, même avec l´excellente performance de dix musiciens, on a davantage l´impression d´une musique de synthèse qui ne peut créer l´ambiance sonore de la création viennoise avec son orchestre de 28 musiciens.

Thoams Borchert  et Veronica Appeddu


L'interprétation est globalement de grande qualité et sert admirablement le spectacle. Thomas Borchert  est un immense comédien qui a plus de 25 ans de planches. Il chante le rôle de Krolock avec un succès toujours répété depuis 2003, année où il l'interpréta pour la première fois à Hambourg. Son Comte est d' autant plus impressionnant qu' il est fort grand et que son costume fait de lui un géant à côté de la mignonne Sarah de Veronica Appeddu qui semble lui arriver au nombril: une très belle interprétation d'un Krolock aux multiples facettes qui peut se montrer charmant et séducteur et qui sait faire preuve de contenance puisqu'il se retient au moins un soir de goûter au sang de Sarah, réservant ce festin pour la soirée du bal. Appeddu vient quant à elle de faire ses débuts en Allemagne avec ce rôle, qu'elle a déjà interprété il y a quelques mois à Berlin, dans lequel elle donne une Sarah gentillette et coquette, sans véritable profondeur, acceptable, sans plus. Victor Petersen donne Professeur Abronsius de toute beauté dans un rôle de composition surprenant. Petersen est un jeune chanteur fait pour chanter les jeunes premiers et qui ici compose un personnage croûlant, chevrotant et décati, du type 'passera pas l'hiver" avec une extrême drôlerie. Petersen est sorti récemment des rangs de la Theaterakademie August Everding de Munich, une des meilleures hautes écoles de théâtre du pays. Avec cela une voix puissante, et une capacité dans les aigus qui entraîne les applaudissements nourris d'un public ébahi. A ses côtés, Tom van der Ven ne parvient pas à donner grande consistance au personnage d'Alfred auquel le livret n' accorde déjà pas une grande force de caractère. Il est vrai que le rôle est par nature assez difficile.  La voix puissante de Nicolas Tenerani convient parfaitement à la composition du patron de l' auberge, et son jeu d'acteur ménage pas mal d'effets comiques très amusants. Une des plus belles interprétations de la soirée est la servante de Merel Zeeman, qui dans le premier acte donne un „Tot zu sein ist komisch“ très réussi. Elle vole la vedette féminine à Veronica Appeddu, on aimerait entendre bien vite Merel Zeeman dans un premier rôle. Paolo Bianca fait parfaitement ce qu' on lui demande, à savoir jouer les Quasimodos, un rôle qui à notre sens est le seul bémol de la mise en scène, on ne voit pas vraiment l'intérêt de la citation du sonneur de Notre-Dame et on aurait préféré voir une création propre de ce personnage. enfin, last but not least, Milan van Waardenburg joue à merveille le rôle de Herbert, le fils du comte, lui aussi un vampire, amis tout aussi homosexuel que son père est hétéro. Il tombe sous le charme du pauvre Alfred qui n´en demandait pas tant et interprète avec beaucoup d' humour une caricature d' homo prétentieux très grande folle.

On passe une soirée  captivante au Deutsches Theater. Les trois heures du spectacle semblent passer comme dans un rêve. Le public est ravi dès la première minute et les applaudissements crépitent à tout bout de champ. Rarement a-t-on vu une standing ovation aussi rapide qu'unanime,  il n'a pas fallu trente secondes pour que la salle entière soit sur ses pieds.

Le spectacle se joue jusque au 15 janvier 2017 au Deustches Theater de Munich. (cliquer sur le lien pour le chemin vers les réservations)

Crédit photographique: Stage Entertainment

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