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lundi 23 avril 2012

Le théâtre de la Gärtnerplatz a fermé ses portes: la fin d'une époque

HEUTE HIER, MORGEN DORT - Die Abschiedsgala vor der Theatersanierung
Et des mains vers le ciel plein de lacs de lumière
S'envolaient quelquefois comme des oiseaux blancs
(
Guillaume Apollinaire, L'émigrant de Landor Road)
Hier le théâtre de la Gärtnerplatz a donné son gala d'adieu avant de fermer ses portes pour une longue période de rénovation. Les meilleures maisons de théâtre et d'opéra ont sans doute de temps à autre grand besoin d'être rafraîchies, mais on a rarement connu des adieux aussi poignants et déchirants. C'est qu'ici, les travaux de rénovation et la nécessaire fermeture de la scène pendant les travaux se doublent d'un changement de directions et s'accompagnent de licenciements massifs: le Dr Ulrich Peters, le directeur général (dénommé intendant en Allemagne), et Hans Hennig Paar, le directeur du ballet, sont arrivés en fin de mandat et n'ont pas vu leurs mandats renouvelés, l'ensemble est dissous, environ douze pour cent des quelques 600 travailleurs de la maison ont été 'remerciés', sans compter les 26 pertes d'emploi du personnel d'accueil, les ouvreurs, les vestiairistes, qui ne peuvent être réemployés dans les salles de spectacle qui accueilleront le théâtre pendant la durée des travaux, car ces salles disposent déjà de leur propre personnel d'accueil. En Allemagne comme ailleurs, c'est la dure loi du monde du spectacle de ne disposer que très rarement de la sécurité de l'emploi, et cette dureté se fait encore plus douloureuse quand les artistes sont licenciés alors que leur travail est couronné par d'immenses succès, et qu'ils ont su créer une contact de connivence, de convivialité sinon d'amitié avec un public d'autant plus désolé qu'il est profondément, viscéralement attaché à l'esprit de la maison. Les habitués du Gärtnerplatzteater connaissent tous les chanteurs et toutes les chanteuses de la troupe ( de l'ensemble comme on dit ici) par leurs noms. Qui plus est, sans doute ni l'intendant ni le directeur de la danse, ni les chanteurs et les danseurs  licenciés, ni les membres du personnel de service ne souhaitaient-ils devoir quitter leur emploi, et le public ne le souhaitait pas davantage.


Et cependant, ces artistes ont fait contre mauvaise fortune bon coeur, et fait preuve jusqu'au bout d'un immense professionnalisme pour ce gala d'adieu qui s'est décliné en 24 numéros extraits des meilleures productions des dernières années: ballets, opéras et comédies musicales. Et ils étaient tous là au meilleur de leurs talents: les directeurs, les chanteurs et les chanteuses, les danseurs et les danseuses, les musiciens et les choristes, le choeur d'enfants, et cinq chefs d'orchestre. Les enchaînements entre les numéros étaient réglés comme du papier à musique et la musique et les voix et les pas de danse  semblaient jaillir du coeur même de ces merveilleux artistes qui avaient organisé pour leurs fidèles ce dernier et somptueux feu d'artifices.

La salle était comble, seuls les plus fidèles, les abonnés, avaient été admis au saint des saints pour ce gala d'adieu, et le théâtre a dû refuser de nombreuses demandes, faute de places. A l'entrée, les spectateurs de voyaient remettre une pochette de mouchoirs en papier, sans doute pour sécher les larmes de la séparation. Et le choix des scènes insistait sur  la thématique du départ et de la fin, scènes de gares où les artistes valises à la main se dispersent vers leurs nouveaux destins, défilements de trains sur l'écran de fond de scène, ...

Et puis ce fut le final et les applaudissements sans fins, les vivas et les bravos éperdus de reconnaissance et d'amour pour ces artistes qui nous ont tant donné, dont nous avons tant reçu. Alors  on se mit à ouvrir les pochettes de mouchoirs, et à agiter les carrés de papier blanc en signe d'adieu, tant dans le public que sur la scène, comme un lâcher de blanches colombes qui ne reviendront jamais. 

Resteront les souvenirs, la reconnaissance et la tristesse. C'est les yeux grands ouverts, en toute lucidité et en pleine conscience que nous venons de vivre les derniers moments d'une époque glorieuse.

Adieu et merci.

Attention: la saison n'est pas terminée pour autant. Trois nouvelles productions verront encore le jour d'ici à juillet, elles seront accueillies au Prinzregententheater à partir du 18 mai. Pour renseignements et réservations: cliquer ici.



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