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lundi 8 janvier 2018
dimanche 7 janvier 2018
Fous couronnés, une étude du Dr Augustin Cabanès
Le Dr Augustin Cabanès (1862-1928), pharmacien, docteur en médecine, journaliste et historien de la médecine français, figure importante de l'histoire de la médecine, connu pour ses ouvrages relatifs à des mystères de l'histoire, et en particulier de l'histoire de la médecine. Il a notamment publié deux études sur les souverains atteints de démence.
De bonne heure attiré par les lettres, Cabanès avait fait ses débuts, en 1886, dans les recherches spéciales auxquelles il devait se consacrer, par un court article intitulé Souverains névropathes, qui parut dans le Progrès médical, et qui mentionne d'entame la personnalité du Roi Louis II de Bavière, pour ne plus y revenir dans le reste de l'article:
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in Le progrès médical: journal de médecine, de chirurgie et de pharmacie (Année 14, Ser. 2, T. 4)., Paris, 1886 |
En 1914, il publiait ses Fous couronnés, où il se penche sur les personnalités de Jeanne la Folle, Philippe II d'Espagne. Pierre le Grand. Pierre III, Paul Ier de Russie. Christian VII de Danemark, Othon et Louis II de Bavière. A noter que le premier volume de ses Grands névropathes. Malades immortels se terminent par une étude sur Richard Wagner.
L'ouvrage fut alors bien reçu dans les milieux médicaux comme en témoigne la recension de Gilbert Ballet publiée en 1914 dans Le Bulletin de l'Académie nationale de médecine (pp. 820 et 821), édité par Masson à Paris:
"J'ai l'honneur de déposer sur le bureau un intéressant ouvrage sur les Fous couronnés. Il est de M. le Dr Cabanès, dont vous connaissez l'érudition et la grande activité et dont plusieurs livres ont été, et l'un tout récemment encore, présentés à l'Académie. Si l'ouvrage était destiné spécialement au public médical, je chicanerais un peu l'auteur sur le titre qu'il a adopté. Le mot fou, qui ne signifie pas grand' chose, qui en tout cas ne signifie rien de précis, doit disparaître de notre vocabulaire; d'ailleurs, en le prenant même dans le sens le plus général et le plus vague qu'on lui donne, il n'est pas légitimement applicable à tous les personnages que M. Cabanès a étudiés.
Mais le livre n'est pas écrit seulement pour les médecins; les laïques aussi prendront plaisir à le lire; le mot fou est dès lors acceptable, car les gens du monde aiment à ce qu'on s'en serve, ayant une prédilection qui n'est pas près de disparaître, pour les termes imprécis et vagues, et Dieu sait si celui-là est vague et imprécis! Pourtant, ne trouvant pas qu'il le fût assez, des littérateurs, peu soucieux d'ailleurs de l'élégance des termes, ont imaginé celui de demi-fous. Va pour les fous et les demi-fous.
M. le Dr Cabanès a esquissé un pittoresque portrait de Jeanne la Folle, l'épouse de Philippe le Beau, qui celle-là méritait bien l'épittète sous laquelle l'histoire et l'auteur la désignent; il a tracé une psychologie très objective et très vivante de Philippe II d'Espagne. On lira avec un intérêt qui ne tombe pas un instant les pages consacrées à la famille des Romanoff, à ce déséquilibré sensuel et grossier, mais homme d'universelle curiosité et aussi de génie que fut Pierre le Grand, à la grande Catherine II, dont on peut se demander si elle ne fut pas quelque peu nymphomane.
M. Cabanès a heureusement restitué une figure moins universellement connue que les précédentes, celle de Christian de Danemark.
Il nous a fait assister à la triste vie et à la non moins triste fin des deux «i fous couronnés » que furent les derniers représentants de la dynastie des Wittelsbach, Othon et Louis Il de Bavière. J'ai lu d'un trait l'ouvrage de M. le Dr Cabanès. Je crois bien que lui qui en a écrit tant d'instructifs et d'attrayants, n'en a pas écrit qui le soient plus que celui-là. On se plaît aujourd'hui à la pathologie et à la psychologie rétrospectives, qui présentent en effet un grand charme pour ceux que l'érudition ne laisse pas indifférents. Faites par les pathologistes ou les psychologues, elles ont, il faut bien le reconnaître, quelquefois un air un peu rébarbatif. Ne nous plaignons pas que de temps en temps, les spécialistes passent la plume aux simples médecins historiens l'analyse des caractères peut y perdre un peu en précision, mais elle y gagne en intérêt. Je connais des ouvrages que les aliénistes trouveront plus fouillés, je n'en connais pas qu'ils trouveront d'une lecture aussi captivante que celui de M. Cabanès."
samedi 6 janvier 2018
Les Sternsinger, la tradition enfantine de l'Epiphanie en Allemagne
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Crèche de Noel avec Rois Mages. Gasthof Römerschantz, Mittenwald |
20 * C + M + B + 18
Dans les régions allemandes à prédominance catholique, des Sternsinger, littéralement des chanteurs à l’étoile, viennent frapper aux portes, chantent et récoltent des dons ou des friandises. Il s'agit de groupes d'enfants déguisés en rois mages avec un bâton de pèlerin orné une étoile d’or, symbolisant l’étoile de Bethléem. En remerciement des dons reçus, ils bénissent les maisons en marquant à la craie, au-dessus de la porte, une série de chiffres et de lettres– les lettres C+M+B signifient Christus Mansionem Benedictat (Que le Christ bénisse cette maison!) mais aussi Caspar (Gaspard en allemand), Melchior et Balthazar. Les chiffres 20 et 18 mentionnent l’année, 2018, et l’étoile représente l’étoile de Bethléem. La formule C+M+B interdirait l'entrée des forces maléfiques dans la maison ainsi protégée.
vendredi 5 janvier 2018
Gravure funèbre du Roi Maximilien II de Bavière
Gravure funèbre publiée dans la presse illustrée lors du décès du Roi Maximilien II de Bavière en mars 1864.
jeudi 4 janvier 2018
Annonce de la naissance du Prince Louis de Bavière dans L'Allgemeine Zeitung du 26 août 1845

Le journal annonce que la naissance s'est bien déroulée et que la princesse héritière et son nouveau-né se portent bien. Le texte précise le lieu et l'heure de la naissance, au château de Nymphenburg à 0H38 du matin, et souligne que le petit prince est né le même jour et à la même heure que le Roi Louis Ier, né le 25 août 1786. Le journal voit dans cette coïncidence un heureux présage. Dès trois heures du matin, alors que des coups de canon avaient été tirés pour saluer l'événement, le peuple manifestait sa joie dans les rues de Munich. "Un prince, et justement le jour de la naissance du roi, le ciel est avec notre roi", s'écria un homme. L'émotion populaire s'exprima par des larmes de joie. Le journal annonce encore le baptême du prince prévu pour l'après-midi du lendemain dans la grande salle du château de Nymphenbourg. Il note encore que leurs Majestés le roi et la reine de Prusse sont arrivés dans l'après-midi à Nymphenbourg, en provenance du Tegernsee.
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mercredi 3 janvier 2018
Lotte de Beer et Kirill Petrenko donnent un Trittico de légende au Bayerische Staatsoper
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Suor Angelica, Schuster, Jaho. Crédit photos: Wielfried Hösl |
Pour le tryptique puccinien, nous avons retrouvé non sans gourmandise la metteure en scène Lotte de Beer, qui s'était déjà signalée à la Biénnale de Munich et dont nous avions l'été dernier pu apprécier l'extraordinaire travail dans le Mosè in Egitto du Festival de Bregenz sur le lac de Constance. Nous nous demandions comment la Néerlandaise allait résoudre l'équation complexe et plutôt épineuse de la mise en scène de ces trois opéras qui appartiennent à trois genres différents, Il tabarro, un mélodrame vériste, Suor Angelica, un court opéra lyrico-mystique et, Gianni Schicchi, une farce aussi macabre que drôle et savoureuse.
En 2015, Lotte de Beer remportait un International Opera Award en tant que Best Newcomer (meilleure révélation) et décroche depuis lors des contrats dans les meilleures maisons. Avec Il Triticco, elle réussit sa grande entrée au Bayerische Staatsoper avec une mise en scène intelligente et visionnaire.
Lotte de Beer et son conseiller Peter te Nuyl résolvent le problème de la diversité des trois opéras en en respectant l'inscription temporelle, comme en témoignent les costumes très réussis de Jorine van Beek, qui rendent bien l'atmosphère du pauvre milieu des débardeurs parisiens du début du 20ème siècle, celle de la clôture d'un couvent du 18ème siècle et celle enfin de la Florence du 13ème siècle. C'est par le truchement d'un extraordinaire décor unique dû à Bernhard Hammer et par la thématique commune de la mort que les trois panneaux du Tryptique se trouvent reliés. Le décor figure un tunnel fait de tronçons qui vont s'élevant et s'étrécissant vers le fond de scène et dont une des fonctions symboliques est de représenter le temps qui passe et de permettre le défilé des siècles de l'action. Lors de l'ouverture du Tabarro, c'est un cortège funèbre qui parcourt le tunnel avec deux cercueils, un grand cercueil contenant un corps adulte et un petit cercueil pour enfant. Ensuite, par le truchement des accessoires, le tunnel figurera la péniche et les bords de Seine, le couvent et enfin la chambre funèbre de Gianni Schicchi. Les éclairages d'Alex Brok et des enfumages bien calibrés accentuent le rendu des atmosphères. Les effets visuels s'enchaînent avec souplesse, avec des moments plus intenses à la fin du premier et du deuxième opéras, où l'anneau du second tronçon du tunnel effectue un mouvement complet de rotation, une grande roue qui entraîne le cadavre de Luigi fixé à la paroi et plus tard le fils mort de Suor Angelica qui lui est apparu enchâssé dans une grande croix formée d'un pourtour de lampes à la blanche incandescence. La répétition du procédé crée l'attente d'une répétition dans le troisième opéra, attente subtilement déçue car Lotte de Beer a opté pour l'effet miroir inversé de la suspension d'un lit à baldaquins reproduisant le lit sur lequel repose le cadavre de Gianni Schicchi. La difficile équation est brillamment résolue, la spécificité de chacun des opéras est parfaitement rendue et cependant des charnières solides relient les panneaux du triptyque: le tunnel et ses rotations, les thèmes de la mort et des amours illicites ou interdites par le jeu des conventions sociales.
La réussite de la mise en scène s'accompagne d'un plateau prestigieux et d'une interprétation orchestrale dirigée par les mains précises du magicien Petrenko, qui excelle à rendre les émotions, les tendresses, les surprises et l'humour de la partition. Si le Trittico est rarement monté dans son intégralité, c'est aussi en raison du coût que représente le nombre important de premiers rôles, une pierre d'achoppement sur laquelle ne semble pas buter le Bayerische Staatsoper, qui sait se donner le moyen de ses ambitions et engage les meilleurs interprètes, dont le seul énoncé des noms fait rêver. Dans le Tabarro, Wolfgang Koch prête son baryton basse dramatique et puissant au personnage de Michele, auquel son gabarit imposant convient bien et qu'il interprète en lui donnant une humanité peu commune à la représentation de ce personnage. Les hésitations de Giorgetta sont subtilement rendues par le jeu de scène incandescent et le soprano vibrant, d'Eva-Maria Westbroek. Yonghoon Lee donne un Luigi très applaudi avec des chaleurs de timbre, un volume intense, de la plénitude, de l'emphatise parfois même, de la richesse. On retrouve avec grand plaisir cet excellent ténor qui avait donné en janvier 2017 un éblouissant Don Carlo. La Suor Angelica d'Ermonela Jaho était un des moments attendus de la soirée, c'est ce rôle qui a révélé la chanteuse albanaise en 2011. La soprano a surtout donné une interprétation aux qualités dramatiques bouleversantes qui exprime l'agonie d'une mère écartelée, d'une religieuse par contrainte dont la foi s'avère inefficace et que seul un miracle peut sauver. Michaela Schuster rend admirablement la rigidité sordide et glaçante de la tante-princesse. Enfin, dans le troisième opéra, Ambrogio Maestri brûle les planches avec son Gianni Schicchi à la truculence pantagruélique, avec une puissance d'interprétation au phrasé exemplaire, inénarrable de drôlerie dans son imitation nasillée de Buoso Donati. Pavol Breslik reste quelque peu en deçà du rôle de Rinuccio, Rosa Feola donne le seul aria de la soirée, "O mio bambino caro", avec des accents qui touchent tout en sachant éviter l'excès. C'est encore à Kirill Petrenko que l'on doit l'extraordinaire fluidité dans le soutien et l'accompagnement des dialogues, qui sont au coeur de la partition et du spectacle du dernier opéra du Trittico.
La nouvelle production du Bayerische Staatsoper a été célébrée par la louange unanime tant du public que de la critique. A voir absolument.
Prochaines représentations les 14 et 16 juillets 2018.
Lotte de Beer et son conseiller Peter te Nuyl résolvent le problème de la diversité des trois opéras en en respectant l'inscription temporelle, comme en témoignent les costumes très réussis de Jorine van Beek, qui rendent bien l'atmosphère du pauvre milieu des débardeurs parisiens du début du 20ème siècle, celle de la clôture d'un couvent du 18ème siècle et celle enfin de la Florence du 13ème siècle. C'est par le truchement d'un extraordinaire décor unique dû à Bernhard Hammer et par la thématique commune de la mort que les trois panneaux du Tryptique se trouvent reliés. Le décor figure un tunnel fait de tronçons qui vont s'élevant et s'étrécissant vers le fond de scène et dont une des fonctions symboliques est de représenter le temps qui passe et de permettre le défilé des siècles de l'action. Lors de l'ouverture du Tabarro, c'est un cortège funèbre qui parcourt le tunnel avec deux cercueils, un grand cercueil contenant un corps adulte et un petit cercueil pour enfant. Ensuite, par le truchement des accessoires, le tunnel figurera la péniche et les bords de Seine, le couvent et enfin la chambre funèbre de Gianni Schicchi. Les éclairages d'Alex Brok et des enfumages bien calibrés accentuent le rendu des atmosphères. Les effets visuels s'enchaînent avec souplesse, avec des moments plus intenses à la fin du premier et du deuxième opéras, où l'anneau du second tronçon du tunnel effectue un mouvement complet de rotation, une grande roue qui entraîne le cadavre de Luigi fixé à la paroi et plus tard le fils mort de Suor Angelica qui lui est apparu enchâssé dans une grande croix formée d'un pourtour de lampes à la blanche incandescence. La répétition du procédé crée l'attente d'une répétition dans le troisième opéra, attente subtilement déçue car Lotte de Beer a opté pour l'effet miroir inversé de la suspension d'un lit à baldaquins reproduisant le lit sur lequel repose le cadavre de Gianni Schicchi. La difficile équation est brillamment résolue, la spécificité de chacun des opéras est parfaitement rendue et cependant des charnières solides relient les panneaux du triptyque: le tunnel et ses rotations, les thèmes de la mort et des amours illicites ou interdites par le jeu des conventions sociales.
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Gianni Schicchi |
La réussite de la mise en scène s'accompagne d'un plateau prestigieux et d'une interprétation orchestrale dirigée par les mains précises du magicien Petrenko, qui excelle à rendre les émotions, les tendresses, les surprises et l'humour de la partition. Si le Trittico est rarement monté dans son intégralité, c'est aussi en raison du coût que représente le nombre important de premiers rôles, une pierre d'achoppement sur laquelle ne semble pas buter le Bayerische Staatsoper, qui sait se donner le moyen de ses ambitions et engage les meilleurs interprètes, dont le seul énoncé des noms fait rêver. Dans le Tabarro, Wolfgang Koch prête son baryton basse dramatique et puissant au personnage de Michele, auquel son gabarit imposant convient bien et qu'il interprète en lui donnant une humanité peu commune à la représentation de ce personnage. Les hésitations de Giorgetta sont subtilement rendues par le jeu de scène incandescent et le soprano vibrant, d'Eva-Maria Westbroek. Yonghoon Lee donne un Luigi très applaudi avec des chaleurs de timbre, un volume intense, de la plénitude, de l'emphatise parfois même, de la richesse. On retrouve avec grand plaisir cet excellent ténor qui avait donné en janvier 2017 un éblouissant Don Carlo. La Suor Angelica d'Ermonela Jaho était un des moments attendus de la soirée, c'est ce rôle qui a révélé la chanteuse albanaise en 2011. La soprano a surtout donné une interprétation aux qualités dramatiques bouleversantes qui exprime l'agonie d'une mère écartelée, d'une religieuse par contrainte dont la foi s'avère inefficace et que seul un miracle peut sauver. Michaela Schuster rend admirablement la rigidité sordide et glaçante de la tante-princesse. Enfin, dans le troisième opéra, Ambrogio Maestri brûle les planches avec son Gianni Schicchi à la truculence pantagruélique, avec une puissance d'interprétation au phrasé exemplaire, inénarrable de drôlerie dans son imitation nasillée de Buoso Donati. Pavol Breslik reste quelque peu en deçà du rôle de Rinuccio, Rosa Feola donne le seul aria de la soirée, "O mio bambino caro", avec des accents qui touchent tout en sachant éviter l'excès. C'est encore à Kirill Petrenko que l'on doit l'extraordinaire fluidité dans le soutien et l'accompagnement des dialogues, qui sont au coeur de la partition et du spectacle du dernier opéra du Trittico.
La nouvelle production du Bayerische Staatsoper a été célébrée par la louange unanime tant du public que de la critique. A voir absolument.
Prochaines représentations les 14 et 16 juillets 2018.
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